Invité;
Invité - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
| Sujet: (césaire) paysages mensongers Dim 21 Mar - 19:24 |
| paysages mensongers@césaire gainsboroughL’hudson exhibe ses reflets d’obsidienne, qui dansent sous la clarté d’une lune pleine, ronde, emplie d’une pâleur qui donne à l’heure quelque chose de divin. L’homme clope patiemment, sous la courbe d’un pont, où les reflets de l’astre déploient des visions douces-amères. Visions arrachées d’un autre firmament, la drogue qui pulsait dans les veines pour brouiller les paysages et les idéaux réunis, ombres estampées sur la toile de tant de nuits. Parfois il l’appelait, il était toujours tard, il prenait la mesure de son calme, et du timbre de sa voix, se le représentait bien mieux que l’unique fois où ils s’étaient croisés. Iskandar déjà paumé, entre les nues d’un autre ciel, ciel d’enfance dans les yeux de sa fille arrachée à la vie bien trop tôt, et les profondeurs insidieuses d’un tourment dont il se nourrissait, apathique et tremblant. Césaire, c’était autre chose, c’était la vision acérée d’un but qui aurait dû être commun, vibrant de cette vérité que l’on excave des gorges coupables, dès leurs exactions révélées. De ces exactions, Iskandar n’aura pas révélé grand-chose, infiltré corrompu par les affres de la violence, les idéaux déchirés par un sens du devoir qui n’en revêtait plus aucun, il s’est perdu sur le chemin de sa quête. Et la voix de son seul contact, baigné par l’aube d’une normalité que le flic ne savait plus voir, fut pour lui évangile et balise, que l’on repère dans la nuit trop opaque et que l’on relit quand le langage vous échappe. Celui des gens et des sentiments qu’ils vous dérobent, par leurs regards ou par leurs silences. Il y a eu entre eux bien trop de silences parfois, et les rapports furent dissolus, depuis qu’Iskandar a repris la tête de l’unité des crimes violents de la police d’état, et que Césaire fraie toujours dans les sphères parentes, pourtant jamais totalement amies, du FBI. Ils se retrouveront bientôt. Car le flic a appelé, tard, tout aussi tard que jadis quand il lui fallait absolument parler, et se souvenir de qui il était. La balise et l’évangile, celui des traqueurs qui flairent le crime et qui finissent par s’y empoisonner. Ni l’un ni l’autre n’en est encore mort, mais chacun est persuadé que le jour viendra, où ils regarderont un horizon identique qui n’aura pourtant pas les mêmes harmonies. Alors plus de balise, et plus de sainte parole, juste la nuit où il faudra s’enfuir et puis se perdre à jamais. Il entend son pas, la même mesure, et Iskandar expire la fumée, regarde se brouiller les reflets de Séléné sur le fleuve avant de s’en détourner, et de lancer un regard à son vis-à-vis, regard moins troublé qu’autrefois, mais d’une neutralité froide, presque glacée. tu ne m’as pas communiqué le dossier que je t’avais demandé. pas de salutations, ou peut-être que c’est là leur façon de chercher en l’autre cette preuve qu’ils existent, que la réalité ne pourrait vaciller au point de leur arracher l’infini de leur reconnaissance. Surtout celle d’Iskandar, qui n’a pas de limite, car sans Césaire, sans les mots, le timbre, et le froid, il aurait disparu, entre l’horizon délétère et les abîmes du crime. mais peut-être était-ce le moyen de me pousser à t’appeler ? Je te manquais, Césaire ? Ma conversation, mes élans affables sans doute ? un maigre sourire, qui lui aussi existe bel et bien. L’affaire n’est qu’un prétexte, il lui fallait respirer le même air que lui, prendre la mesure de son timbre, et s’y laisser dériver. Pour encore exister, dans la réalité duelle qu’eux seuls savent expérimenter. |
|