be still. (serpentine)

if you forget the way to go and lose where you came from, if no one is standing beside you, be still and know i am. -- @serpentine girardi

Elle est éteinte, la flamme. Elle est froide, la braise. Sans force, sans vie, depuis bien trop de temps déjà. Livrée à elle-même dans une existence nauséabonde, vide du moindre bonheur, accablée par la peur, par l’horreur. Douce bianca, fleur fanée avant même l’éclosion. Fleur du mal, accaparée par les plus mauvais comme une poupée de chiffons juste bonne à assouvir les désirs des autres. Blessures physiques, blessures mentales, les secondes deviennent les plus importantes avec le temps, au fil des années qui passent. Les secondes sont les plus puissantes, quand, enfin libérée de ses chaînes, elle se sent encore rattachée à l’insoutenable. elle est là, ta vérité, ta réalité, bianca. t’étais libre de tout arrêter, de dire adieu à ta mère, de prendre ton envol grâce à ton art et te tirer loin d’ici. T’étais libre de mener ta vie, mais t’as décidé de rester, de continuer à céder lorsqu’elle te suppliait, de continuer à te prosituer. abîmée, plus qu’il n’y paraît. Dépendante de la noirceur, des abysses que procurent ce milieu. Parce qu’au fond de son cœur, elle le sait, elle ne mérite pas mieux. Elle ne mérite ni l’amour, ni la paix. Ni l’espoir, ni la joie. Coupable, responsable, de ce qui la hante, ce soir. Des mains de cet homme qu’elle sent encore contre son corps. Coupable de sa violence. Coupable de sa haine, défoulée sur elle. douce bianca, sans secours, sans vie. elle a tenu bon, jusqu’à chez elle. Elle a tenu bon, malgré les souffrances. Parce qu’elle savait que serpentine serait là. Qu’elle serait là comme elle l’est toujours. Deux âmes égarées, deux femmes perdues dans les méandres de la prostitution, qui se sont trouvées pour ne plus jamais se lâcher. deux aimants, elle est ton alter égo, ton double, elle est ton amie la plus précieuse, la meilleure d’entre elles. Serpentine, elle mérité le monde, elle mérite l’or et tous les joyaux, mais, comme toi, elle s’est heurtée à la véracité d’un monde trop cruel. devant son appartement, comme chaque vendredi soir de la semaine, elle frappe. Elle frappe, plus hésitante. Elle frappe, le cœur lourd, les marques encore présentes sur son poignet. Elle frappe, et peut-être qu’elle devrait se tirer, qu’elle devrait préserver serpentine du mal qui la ronge. salut... qu'elle lâche faiblement, en la voyant apparaître. mais t’as tellement besoin d’elle, bianca. t’as toujours eu tant besoin d’elle. Cette lueur scintillante venue t’offrir son réconfort. Cette écoute permanente de deux cœurs en proie aux mêmes souffrances.

(c) calaveras.

— @Bianca Rosen
“It's been so long since you were out of the house I thought perhaps you had gone for a drive or something. You know I was thinking, it's ever so long since we had a talk, you know, a real talk about the future and everything. Jane, I didn't want you to be worried about the house, even if I do have to sell it, we'll still be together.”

Des enfants dévorées dans la Grande Pomme. L'âme vendue au Diable pour survivre dans la mégalopole. Leur choix est écrit dans le Grand Livre de leur vie. Les corps consommés pour payer les factures, et dans cette cruauté immense, l'Italienne garde en son coeur, son rêve édulcoré. Un jour, son obstination payera. Un jour, elle y arrivera. La tête haute et le regard impérieux. Elle regardera tout ceux qui l'ont trépassé. Elle jouira de sa force divine pour les écraser. Un renversement des vapeurs qui trotte dans sa tête.

Tous ne sont pas damnés. Quelques entités sont porteuses d'espoir. D'amour. De douceur. Bianca. Les routes se sont croisées des années plus tôt et elles ne se quittent plus. Jeunes femmes ont trouvé un peu de réconfort dans leur amitié. Un baume de coeur comme on n'en fait plus. Peu importe le lieu, ensemble, elles sont réfugiées. Ensemble, elles sont plus fortes. Ces poupées désarticulées qui complotent en silence leur prochaine liberté.

Vendredi soir, comme la récompense d'une semaine durement écoulée, ses pas la mènent dans le rituel de l'appartement. Là où chacune se ressource de l'autre. Puisant de la force pour repartir à nouveau. Dans le cycle interminable dans lequel elles se sont engagées. Dans les rouages de leur monde sombre.

La porte s'ouvre sur un regard éteint. Serpentine ne le voit pas. Les bras enlacent autour du corps récemment meurtri. L'accolade à l'italienne. Chaleureuse uniquement pour ceux qu'elle porte dans son coeur. Baiser déposée sur la joue délicate, elle trace dans l'appartement pour poser les pizzas achetées sur le comptoir.

- Tu vas bien, amore ?

Le corps pivote vers l'hôtesse, la maladresse de la question résonne encore. Les sourcils s'haussent en remarquant l'attitude de son amie.

- Oh.

Voyelle lâchée sous la contemplation de sa bêtise. Non, elle ne va pas bien, et sa douleur vient la frapper comme si elle est sienne. Bianca et Serpentine ou l'allégorie des soeurs siamoises.

if you forget the way to go and lose where you came from, if no one is standing beside you, be still and know i am. -- @serpentine girardi

Le cœur trop émotif, pour parvenir à cacher la vérité à sa bien-aimée. Le cœur trop larmoyant, pour arborer ce visage parfait, la lumière artificielle de ses nuits funestes. L’hypersensibilité exacerbée, toujours, mais serpentine ne juge pas. serpentine ne juge jamais. parce qu’elles sont les mêmes, ou bien parce qu’elles s’aiment. une question qu’elle ne se pose pas, bianca, parce que la réponse ne l’intéresse pas. tu te fiches de savoir pourquoi elle est ton âme-sœur, tout ce qui compte c’est qu’elle soit là, toujours. qu’elle reste près de toi, toujours. la belle italienne, la seule capable de l’approcher avec tant de facilités. La seule capable de l’aimer sans qu’elle ne prenne la fuite. Celle qui se sent trop impure, trop sale, pour accepter la tendresse et l’affection d’une personne aimante. mais serpentine, tu ne sais pas la repousser, tout comme tu ne sais pas lui mentir. Tout comme tu ne veux pas lui mentir. Elle est l’une des seules qui sait, après tout, que tu cours encore les passes une fois le soir venu. finalement, les mots n’ont pas d’utilité, entre elles. parce que serpentine, elle décèle en un regard que les ténèbres se sont abattus sur la fleur fanée un peu trop intensément. Haussant les épaules, elle peine à s’exprimer, elle peine à expliquer ce qui se trame derrière ce joli visage de poupée. je suis contente que tu sois là… simplement. Un aveu, aveu de faiblesse, aveu d’amour. Peu importe, elle s’en moque. t’es pas contente, bianca. t’es soulagée comme si ta vie en dépendait. j’ai eu une… une petite altercation avec un client… pas besoin d’en dire plus, elles connaissent toutes deux la brutalité de ce monde. toute deux la folies des machiavels qui brisent les porcelaines comme elles. qui éteignent les lumières, abîment les rêves, s’érigent comme monstres aux crocs acérés pour dévorer les chairs les plus fragiles, les chairs les plus faibles. Serpentine, elle est plus belle que ce monde. elle mérite mieux que l’horreur.

(c) calaveras.

— @Bianca Rosen
“It's been so long since you were out of the house I thought perhaps you had gone for a drive or something. You know I was thinking, it's ever so long since we had a talk, you know, a real talk about the future and everything. Jane, I didn't want you to be worried about the house, even if I do have to sell it, we'll still be together.”

Le voile se lève avec une facilité déconcertante. Âmes soeurs, elles se lisent en transparence et partagent tout. Le mensonge ne peut s'installer. Il sonnerait comme une mélodie dysfonctionnelle. Une disharmonie qui n'a pas sa place. Un intrus exacerbé.

Alors que la peine se lit comme un écho de miroir. Serpentine sent son coeur se broyer dans l'allure du corps brisée de son interlocutrice. Sans contenir son attitude latine, elle la prend dans ses bras sous l'impulsion maladroite. Étreinte chaleureuse du réconfort. Comme lorsque l'on rentre à la maison, après un trop long voyage.

- Amore mio tesoro.

Les mots lâchés sous la spontanéité du sentiment. À cette sensation de sentir le corps sous l'émotion brutale de la fameuse altercation. Elle dépose un baiser sur le front avant de saisir les deux mains de sa jumelle. Elles sont liées. Elle ne la lâchera jamais.

- Tu es en sécurité ici. Tu peux être toi, tu peux souffler.

La violence, elle est le synonyme de leur quotidien. Sans vraiment de possibilité de fuite. Les risques du métier. Les risques de leur milieu.

- Si tu as son nom enregistré dans un registre, je peux m'en occuper. Tu peux être venger.

Caractère fougueux, elle garde en tête que malgré leurs conditions difficiles, ces femmes qui vendent leur chair ont pour atout qu'elles sont désirées. Les clients veulent les consommer, les porter comme trophées, et parfois, ce comportement primitif est aussi ce qui entraîne leur chute.