(ryder) digne de confiance

Ivy et sa cage dorée. Ivy et sa cachette. Ivy et ses écrits gravés dans ses petits carnets. Des carnets, plein de carnets. Plus ou moins cachés. Ses écrits qui parlent de liberté, qui parlent d'optimisme surtout. Ses cahiers qui racontent des histoires d'amour. Elle aurait aimé écrire un livre mais, elle se doute que ses écrits ne sont pas à la hauteur. Et puis, finalement, elle préfère ses carnets secrets. Bien cachés dans son petit espace de vie. Parce qu'elle y tient, un peu comme la prunelle de ses yeux. Ses carnets, elle ne les montrait pas aux autres filles. Elle les aurait bien montré à Faye, une amie mais elle ne la trouvait plus depuis quelques jours. Ivy commençait à sérieusement s'inquiéter. Les deux jeunes filles s'entendaient si bien. Des caractères opposés mais qui s'entendaient bien au final. Ivy soupira et se leva de son lit. Faye. Quelques jours déjà et elle lui manquait. Ivy était anxieuse à l'idée que quelque chose de grave ait pu arriver à Faye. Elle n'avait pas osé en parler à Savas, de peur de le déranger. Et même si Faye était quelqu'un d'important ici, Ivy ne voulait pas faire de vagues. Elle préférait se taire et s'inquiéter en silence. En tout cas pour l'instant mais, elle sentait peu à peu ses sentiments la consumaient. Elle eut cette demande intérieur urgente: il fallait qu'elle demande. Mais pas à Savas, pas à lui. Elle ne voulait pas prendre le risque de le mettre en colère. Alors, elle sortit de sa chambre. A la recherche de quelqu'un pouvant l'aiguiller. Elle regarde, elle fureta un peu partout. Juste quelqu'un implora-t-elle. Et puis elle vit une ombre. Ombre qu'elle connaissait. Un sourire illumina son visage. " RYDER ! " dit-elle avec beaucoup trop d'entrain. Comme toujours, elle était joyeuse. Elle s'approcha, ce grand sourire aux lèvres. Elle ne savait pas comment agir avec le "personnel" de la maison. Alors, elle garda respectueusement ses distances. " Désolée de te déranger Ryder, je voulais savoir... Tu as vu Faye ? Je la cherche et... elle n'est pas là. Je m'inquiète. " Ivy et sa voix douce montrant la profonde inquiétude qu'elle ressent. Elle se met à regarder ses pieds, à se dandiner. Comme une enfant qui a trop peur de déranger. Elle n'ose pas le regarder dans les yeux. Elle ne sait pas vraiment pourquoi. Parce qu'il est trop charmant ? Elle se le demande mais, le principal est de savoir où est Faye.

Ivy + Ryder /  « RYDER ! » Voilà une belle manière de démarrer la journée, se dit l’intéressé, dont l’humeur était pour le moins maussade ces derniers jours. En ce moment, il en avait par-dessus la tête d’à peu près tout le monde à la maison close, que ce soit les filles qui travaillaient à son service ou Colomba Vermeil qui lui mettait des bâtons dans les roues en voulant récupérer la fille qu’il avait renvoyée quelques jours plus tôt. La patience de Ryder étant à peu près inexistante, il ne lui fallait pas grand-chose pour être irritable, et c’est donc avec un soupir et un air mauvais qu’il se retourna à l’entente de son nom. « Quoi ? » Son regard se posa alors sur la personne qui l’avait interpellée, et se fit aussitôt un chouïa plus doux. « Oui, Ivy ? » Ivy. À l’égard de la jeune fille, Ryder oscillait entre agacement et attendrissement. Contre toute attente, aujourd’hui, c’était l’attendrissement qui l’emporta. Difficile de faire autrement face à ce petit bout de femme qui, sitôt qu’il s’était retourné, s’était pratiquement recroquevillée d’intimidation. « Désolée de te déranger Ryder, je voulais savoir... Tu as vu Faye ? Je la cherche et... elle n'est pas là. Je m'inquiète. » Oh, Ivy, se dit-il, à deux doigts d’énoncer les mots à voix haute. Un sourire compatissant se dessina sur son beau visage et son regard, rivé sur Ivy qui semblait ne pas oser le soutenir du sien, se fit encore un cran plus doux. « Faye risque de ne pas revenir dans les parages avant un moment, Ivy… Mais je ne pense pas que tu doives t’inquiéter, tu sais. » La profonde bienveillance qu’il semblait manifester face à Ivy contrastait de manière surprenante avec l’évidente indifférence que lui inspirait Faye. Il y avait quelque chose chez Ivy qui le poussait à agir avec une douceur, quelque chose d’autre que l’aura de la jeune femme, qui inspirait automatiquement la sympathie. Sans doute s’agissait-il de convoitise. Ivy était la seule et unique fille de la maison close qui n’avait pas dû se déshabiller à un moment ou un autre pour Ryder. Généralement, elles le faisaient toutes au terme de l’entretien d’embauche qu’il leur faisait passer. Et celles que Savas engageait, comme c’était le cas d’Ivy, il s’arrangeait pour les faire passer à la casserole peu après leur arrivée. Mais Savas avait été formel au sujet d’Ivy – Ryder n’allait pas pouvoir tremper son biscuit de sitôt, car le patron comptait tirer une belle somme de la virginité de la demoiselle. Loin de révolter Ryder, cette idée le frustrait, comme s’il avait été un enfant de cinq ans à qui on aurait refusé un unique jouet et pour qui tous les autres jouets perdaient dès lors de leur intérêt. Et ce jouait-ci, Ryder comptait bien, d’une façon ou d’une autre, l’obtenir un jour. Alors, il avait décidé de troquer la frustration et l’agacement qu’avaient initialement suscitées chez lui le traitement de faveur flagrant dont bénéficiait Ivy contre cette attitude chaleureuse destinée à la mettre en confiance. Ryder posa une main sur la frêle épaule d’Ivy qu’il serra avec douceur, lui sourit une nouvelle fois avec gentillesse avant de s’apprêter à poursuivre son chemin.

Sa seule préoccupation du moment est Faye. Parce qu'elle l'aimait trop. Les autres filles se comportaient d'une manière bizarre avec Ivy. Elle avait essayé de tisser des amitiés. Mais ça avait vraiment marché avec Faye. Donc, Ivy se préoccupait beaucoup de son cas. Parce qu'elle se sentait trop seule parfois. Elle avait Savas. Et Faye. " Quoi ? " A sa réponse, Ivy se fit toute petite. Effectivement, elle le dérangeait et elle en était vraiment désolée. Elle se dandina sur ses pieds, comme une gamine qui ne sait plus trop quoi faire. Elle s'apprêtait à s'excuser et à tourner les talons quand le visage de Ryder devînt plus doux. Elle osa enfin le regarder dans les yeux. Dans les yeux mais pas trop quand même. " Oui, Ivy ? " La blonde avait failli lâcher un soupir de soulagement. Il ne lui en voulait pas. C'était donc un bon point. Elle lui sourit. Parce qu'elle était vraiment heureuse qu'il ne lui fasse pas la morale. Elle lui sourit comme la gamine innocente qu'elle était.  Et puis, elle posa sa question, penaude. Parce qu'elle ne voulait pas le déranger et si elle l'avait dérangé c'est parce qu'elle était vraiment inquiète. Vraiment. Jamais elle n'oserait déranger quelqu'un alors qu'il travaillait peut-être. "  Faye risque de ne pas revenir dans les parages avant un moment, Ivy… Mais je ne pense pas que tu doives t’inquiéter, tu sais. " Ivy avait osé le regarder dans les yeux à ce moment. Son regard était empli d'espoir. L'espoir se mua vite en déception, en tristesse profonde. Elle arrêta de se dandiner, accablée par la tristesse. Elle soupira essayant de ravaler ses larmes, ses doutes et tout ce flot de sentiments. Faye. Comme une prière lancée à Dieu. Reviens s'il te plaît, tu me manques. Des pensées qu'elle voulait que Dieu entende. Malheureusement, elle ne reçut aucune réponse. Elle savait que les réponses divines prenaient du temps. La seule réponse qu'elle voulait, c'était le retour de sa chère et tendre Faye. Elle se mit à ressasser les paroles de Ryder. En boucle. Comme un refrain. Parce qu'elle espérait, elle espérait encore. C'est à ce moment là qu'elle sent une main sur son épaule. Elle relève les yeux. Elle voit que Ryder s'apprête à partir. Elle paniqua intérieurement. Les autres filles avaient l'air de dire que seul Ryder détenait la réponse à sa sempiternelle question. Elle se refit une dernière fois en boucle les paroles que Ryder lui avait adressées. Elle eut une illumination, un grand sourire orne désormais la bouche de la blonde. " Si elle ne revient pas avant un moment, ça veut dire qu'elle va revenir un jour ?! Son regard avait des étincelles d'espoir. Ivy y croyait tout bonnement au retour de Faye. Elle espérait revoir le sourire de son amie. Et Ivy était prête à l'attendre. Même si elle revenait dans quelques mois, Ivy était prête. Elle se tiendrait dans sa cachette jusqu'à que la porte s'ouvre et qu'elle voit Faye dans l'encadrement de sa porte. Elle pensa au bonheur qu'elle ressentirait en voyant son amie. " Je m'inquiète tellement Ryder. C'est vraiment une amie pour moi. Les autres filles, et bien, elles me regardent juste bizarrement. Je crois que Faye est ma seule amie. " Ivy soupira. Non, elle ne voulait pas pleurer devant Ryder. Ce n'était pas une question de fierté. C'était une question de pitié. Elle ne voulait pas déranger Ryder en pleurant toutes les larmes de son corps. Elle ne voulait pas. Elle n'était pas capable de retenir quelqu'un contre son gré et s'il voulait partir, il le pouvait. Elle s'écarta un peu. Pas pour rejeter la main de Ryder sur son épaule mais juste pour le laisser passer s'il avait envie de passer son chemin. S'il avait envie de passer son chemin et de laisser Ivy seule. Toute seule. Sans Faye. Elle aurait juste Savas pour se consoler mais aussi, elle ne préférait pas le déranger.

Ivy + Ryder /  Ryder ne put s’empêcher d’esquisser un petit sourire en voyant l’apparente terreur d’Ivy – comme si elle redoutait d’éveiller en lui une colère noire par le simple fait de l’avoir interpellé. Il est vrai que dans ses mauvais jours, Ryder ne faisait qu’une bouchée du premier malheureux à qui venait la mauvaise idée de le déranger. Mais Ivy avait ce petit quelque chose d’apaisant qui l’empêchait de perdre patience aussi rapidement qu’il le faisait d’ordinaire. Même l’hallucinante naïveté de la jeune femme ne parvint pas à entamer la bienveillance de Ryder – alors que les mêmes propos dans la bouche d’à peu près n’importe qui d’autre lui auraient sans le moindre doute arraché un haussement de sourcils et un regard exaspéré. Mais pas Ivy. « Si elle ne revient pas avant un moment, ça veut dire qu'elle va revenir un jour ?! » Cette fois-ci, face à son expression soudainement béate et son ton plein d’espoir, Ryder ne parvint pas à réprimer son « Oh, Ivy… », l’air aussi compatissant qu’incrédule. Mais il ne sut trop si elle avait prêté attention à ces deux petits mots prononcés à voix basse, car voilà que, visiblement moins inquiète de ses réactions qu’elle ne l’avait été une minute auparavant, Ivy reprenait la parole. « Je m'inquiète tellement Ryder. C'est vraiment une amie pour moi. Les autres filles, et bien, elles me regardent juste bizarrement. Je crois que Faye est ma seule amie. » Ryder n’était pas un grand amateur de pleurnicheries dans le genre, et s’il faisait mine de s’y intéresser cette fois-ci, c’est qu’il avait quelque chose derrière la tête. Jouer le rôle de la mère-grand afin de ne pas laisser entrevoir son visage de grand méchant loup, en quelque sorte. Il la vit changer à nouveau d’attitude, comme si elle s’était rendue compte qu’elle avait abusé de sa patience et qu’elle tentait désormais de rebrousser chemin. Mais il n’esquissa pas le moindre geste pour s’éloigner d’elle, tout du contraire. « Allez, viens, on va discuter un peu. » D’un geste aérien, la main placée dans le creux des reins d’Ivy, il la guida vers la porte de son bureau, au bout du couloir dans lequel ils se trouvaient. Il en ouvrit la porte et lui fit signe d’entrer, avant de la suivre à l’intérieur. Il s’installa à son bureau, lui intima d’en faire autant d’un regard et prit deux verres derrière lui dans lesquels il versa un fond de scotch. Il en tendit un à Ivy, avant de prendre une gorgée du sien. « Ivy, je suis désolé que Faye te manque, mais si tu veux la revoir, je te conseille d’essayer de la retrouver ailleurs qu’ici. En ce qui me concerne, Faye ne remettra plus les pieds dans cette maison. » Là encore contrastaient la douceur de sa voix avec le désintérêt manifeste à l’égard de Faye. « Elle n’a pas respecté les règles, et moi, je ne veux pas travailler avec des personnes en qui je ne peux pas faire confiance, tu comprends ? » Nouvelle gorgée, avant de river son regard sur son interlocutrice et de se pencher légèrement en avant. Il posa une main sur la sienne, cherchant le regard visiblement toujours un peu anxieux d’Ivy. « En ce qui concerne les autres filles, si l’une d’entre elles te pose le moindre problème, viens m’en parler. L’entente entre collègues, ça aussi, ça fait partie des règles. » Sous-entendu, il se débarrasserait de celle qui causerait du tort à Ivy. Cette attitude altruiste était pour le moins surprenante venant de Ryder, et pour cause – il ne possédait pas une once d’altruisme, et nombreux étaient les témoins à même d’en témoigner. Mais ça, Ivy ne le savait probablement pas. Elle était probablement loin de se douter qu’il était tout simplement en train de lancer une machine destinée à la mettre dans sa poche, à gagner sa confiance la plus totale pour ensuite en faire ce que bon lui semblait. Ivy, il la désirait, et s’il se limitait pour le moment à de petits gestes en apparence bienveillants comme lui tenir la main ou l’épaule, dans sa tête, c’étaient de tout autres contacts qu’il se représentait, et il avait bien l’intention de les concrétiser tôt ou tard.