(E L O U P) encre à l'amer

(E L O U P) encre à l'amer - Page 2 76ap

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j'en ai marre de faire semblant
j'en ai marre de faire comme si tout me glissait dessus
j'en peux plus d'entendre les sirènes
Même à travers le double vitrage
≡ e l o u p

Périphérique des connexions perdues, bientôt ils deviendront flous l’un pour l’autre (sûrement demain) lorsqu’ils auront rejoint leur draps voie lactée, d’une douceur de soie ou peut-être parfois aussi irritante que du verre, ça provoqu’ra des ecchymoses et les mots plongeront entre leurs lèvres balafrées (les siennes auront un goût de bonbon à la cerise, il en est sûr) couleur artificielle dont il se pare chaque nuit à coups de maux et à coups de coups répétés. Peut-être qu’un jour ils deviendront fous l’un pour l’autre mais sûrement qu’ils le sont déjà chacun de leur côté mais à quoi bon espérer un demain sans démon, une route sans carrefour morbide et un avenir sans nuit glaciale ? Nuées d’étoiles qui s’abattent bientôt dans son esprit comme des météores….la noirceur de la nuit change Loup, comme si le mal s’insufflait dans ses veines et se mélangeait à son sang et ça le glace. Il pose ses pieds sur une marelle invisible dont le sommet est vertigineux et pour sûr, il finira par tomber de cette falaise de conneries où il est entrain d’attirer l’inconnue.

- Seulement si tu me promets que moi je pourrai toujours te voir.

SHE TASTES LIKE EVERY DARK THOUGHT I'VE EVER HAD
Il aimerait bien pouvoir lui souffler des paroles qu'ils n'entendront que sous leur cil... douce mélodie qui se mélangerait à leurs souffles chauds qui viennent s'entrechoquer dans cette proximité limitée, il aimerait pouvoir attraper sa main pour s'envoler dans les cieux et dormir sur les nuages cotonneux
Nuages
(comme ceux qui règnent sur son coeur
faisant de l'ombre à sa raison
mettant la couronne à ses cheveux blonds)
Les étoiles clignotent dans le ciel dans un décor néon, dessiné à l'encre de chine bleue.

- Ca dépend, j'ai quoi à gagner à te laisser cette chance?

Chance (lol)
Même les chaises auraient rigolé d'entendre cette bêtise venue des abysses de son être.

- Je suis d'accord. Un monde où on ne vieillit jamais.

Peter Pan des temps modernes, il se retrouve plutôt en position d'un enfant perdu que d'une fée aux pouvoirs multiples. Peut-être serait-elle sa magicienne, celle qui répandrait ses poussières d'étoiles sur sa peau bronzée, qui couvrirait les ecchymoses, qui couvrirait les bobos (aïe) et qui empêcherait le soleil de pleurer jusqu'au bout de la nuit avant de laisser place à la lune-mère.

- Tiens-moi fort la main pour toujours, alors. On réussira à s'éclipser.

(J'en suis sûr)
(Peut-être pas de la manière dont tu l'espères)
(Mais on se volatilisera)
(Morceau par morceau)

Puis Loup il pense au fond de lui qu’à force d’avoir joué avec le bonheur, il a fini par le lâcher. Qu’à force de lui avoir fait des allers et des retours, il s’en est juste allé. Il a juste trainé les pieds, le sourire par terre accroché à un soupçon d’espoir qui bientôt s’envolera, ou se brisera en mille morceau comme une bouteille jetée dans la nuit par un corps enivré et énervé. C’est un peu comme le son de sa voix à Loup, il est brisé, son timbre est saccadé comme son esprit est ravagé. Il ne peut faire autrement que de se laisser guider par ses idées noires, il n’a plus de bouclier, il n’a plus de parapluie magique pour l’ouvrir au-dessus de sa tête et faire taire les orages qui craquent en continue dans le plafond de son esprit.

- Cap.

Le degré de danger qui monte, qui se mélange à l'air ambiante, l'air qui sent déjà un peu l'été, un peu l'soleil (noyé) (à force de trop attendre)
Si Loup l'avait connu y a quelques années sûrement qu'il lui aurait écrit des poèmes (peau aime) dans son journal intime, qu'il aurait rêvé de ses boucles d'or dans son lit le soir et qu'il se serait sûrement imaginé ses lèvres rencontrant les siennes de temps en temps
Mais maintenant, il a des trous noirs et c'est troublant

Alors il descend du vélo Loup, il attrape le sachet rempli d'inconscience dans sa poche avant de prendre un petit carton pour répandre la poudre. Deux traces (d'ennuis), une pour elle, une pour lui
Il fabrique deux pailles avec ce qu'il trouve dans la poche, une pour elle, une pour lui
Il prend d'abord la sienne avant de jeter son regard (comme on se jette à la mer)

- Cap de me donner ton prénom ?

Prend ma main. Prend ma main et ne la lâche pas. Pas maintenant. S’il te plait.
Pour qu’au moins ce soir l’inconnu soit son satellite. Parce que lui il brille dans l’obscurité d’une ville plongée dans la pénombre et éclaire son chemin. Elea elle le suivra quand il prendra les devant et peut-être que lui il la suivra peut-être quand elle repassera devant. Elle l’espère.
Comme une araignée qui tisse sa toile, elle espère que le fil qui les tient proche sera assez solide Elea, qu’il ne se cassera pas à la lumière d’un néon. Que les rayons lumineux ne montreront pas le monstre. Mais elle ne lui dit pas. Parce que c’est idiot. Parce que c’est enfantin (comme elle). Pourtant il pourrait l’entendre, entre ses silences et dans la lueur de son regard.

- Ca dépend, j'ai quoi à gagner à te laisser cette chance?

Elle ne sent pas le vent se refroidir à chaque nouveau mot. Elle se laisse prendre (avoir ?) par la chaleur artificielle qui encercle son cœur. Factice. Pourtant, elle y croit comme une enfant croit au sourire d’un beau garçon.
Ça t’évitera la solitude ? La météo se pare d'un nuage gris pourtant. Tu penses pas que ce s’rait une sorte d’enfer personnel sinon ? Etre invisible pour tous ça veut dire être seul. Tu t’ennuierais vite, non ? Elle hausse les épaules Elea, d’une fausse nonchalance alors qu’elle ne regarde plus que lui.

- Tiens-moi fort la main pour toujours, alors. On réussira à s'éclipser.

Elea elle ne veut plus que décoller du sol elle, s’envoler et rejoindre les nébuleuses. Avec lui. L’emporter dans sa galaxie. Alors elle sourit toujours plus Elea, poupée naïve. J’la lâcherai pas. La promesse imprègne sa peau comme les pigments de l’encre.
Le reflet blanchâtre dans ses iris, elle accepte la paille improvisée et fait disparaitre la trace.

- Cap de me donner ton prénom ?

Elle se redresse pour croiser son regard, replace une de ses mèches derrière son oreille. Ça lui laissera une vilaine marque (même que ça lui pique le nez). Cap mais c’était mon tour alors j’ai le droit à deux casp en échange. Elle veut rire Elea, courir et sentir cette adrénaline qui le maintien en éveil. Elle veut tout ça avec lui. Ce soir au moins. Elea. Ses épaules se haussent et elle se détourne pour récupérer le vélo qu’elle a laissé tomber au sol avant de regarder par-dessus son épaule.
Toi, cap ou pas cap de me donner le tien ? Sourire enfant. Pourtant ça clignote rouge autour de lui. Mais Elea elle aime bien le rouge alors elle s’approche toujours plus. Le guidon dans une main et les doigts de l’autre se saisissent de la main du garçon pour lui passer le relai. Et… cap de me pédaler avec moi jusque là-bas ? Là-bas les hauteurs de la ville et les beaux quartiers. Là-bas où les lumières restent allumées pour éclairer les jolies rues.
Les jolies rues un peu comme dans la capitale anglaise, Elea princesse oubliée des beaux quartiers londoniens.

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j'en ai marre de faire semblant
j'en ai marre de faire comme si tout me glissait dessus
j'en peux plus d'entendre les sirènes
Même à travers le double vitrage
≡ e l o u p

Le vent se lève
Le vent se lève et vient emmêler les jolis cheveux douceur miel de la demoiselle,
Le vent se lève et vient souffler au creux de l’oreille de Loup,
Le vent se lève et ce sont leurs mots qui s’enchevêtrent (se donnent la main peut-être ?)
Le vent se lève et c’est avec leur âme (pourtant parfois déguisée) qu’ils se regardent.
L e / v e n t / s e / l è v e

- Ca t’évitera la solitude ?

Solitude, solitude, il en a passé des années avec solitude. Solitude n’était pas sa meilleure amie mais solitude avait réussi à prendre place intégrante de sa vie. Quand elle était là, il se sentait comme une fleur fanée et pourtant, lorsqu’elle n’était pas là, il se sentait comme une fleur mal arrosée.

- La solitude, c’est ce genre de pute qui t’attend au détour d’une rue. Elle est toujours là, quelque part.

Pessimisme. Soupir perdu dans le naufrage de leur discussion au goût d’un poème. Ou serait-ce ans les volutes de rêves qui s’élèvent lorsque pourtant, Elea est là ?
Elle ravive des endroits dans son corps qui lui semblait pourtant être éteint, comme des parties dysfonctionnelles. Comme des sens interdit sous son enveloppe. Souvent Loup il se sent comme une bouteille vidée jetée violemment contre les briques pourries du Parking, il se sent comme étant le bruit d’une vague se jetant dans la mer, il se sent comme le soir d’une tristesse, comme une insomnie à répétition
Un énième verre d’alcool
Une trentième cigarette

- Tu penses pas que ce s’rait une sorte d’enfer personnel sinon ? Être invisible pour tous ça veut dire être seul. Tu t’ennuierais vite, non ?

Il se souvient lorsqu’il se disait qu’être seul, c’était toujours mieux que d’être avec elle
puis il se rappelle
qu’être avec les autres, c’était toujours plus difficile que d’être avec elle
(Stella)
Alors sans doute que depuis son envolée vers les cieux, petit oiseau bagué
Il serait éternellement seul
(Tel était certainement son désir de l’avoir brisé quelque part)

- On ne peut pas s’ennuyer en étant invisible et je ne pense pas que l’on puisse non plus se sentir seul. Ce n’est pas parce que tu ne peux plus parler avec les gens que tu ne peux plus les observer et c’est peut-être là salutaire que de pouvoir (enfin) observer en silence. Ecouter en silence. Enfin, écouter vraiment, tu vois ? J’pense qu’à l’heure actuelle, les gens passent plus de temps à s’dire ce qu’ils vont rétorquer qu’à vraiment boire les propos de leurs interlocuteurs. Alors je trouve que ça serait une aubaine que d’être présent dans la vie des gens sans qu’ils n’attendent rien de toi… puisqu’ils ne te voient pas.

Dans le fond Loup, ce qui lui ferait le plus peur, c’est d’se rendre compte qu’un jour, tout le monde est quelqu’un d’aléatoire. Que le karma, que les roues qui tournent, que la justice, tout ça, ça n’existe pas.

- J’la lâcherai pas.

Et à ses seules paroles, il y a comme une guirlande lumineuse qui se dessine sur son faciès et peut-être une étoile qui tente de s’accrocher désespérément au creux de ses lèvres.
Touché.

Loup se surprend à s’imaginer qu’Elea deviendrait ses mains qui tremblent le soir lorsqu’il n’a pas sa dose,
Qu’elle deviendrait son idéal jamais retenu,
qu’elle deviendrait la princesse qui glisse ses pieds froids contre ses jambes tard la nuit.
Qu’il se surprendrait à dessiner ses courbes de ses phalanges dans les draps lorsqu’elle ne serait pas là
Il se surprend, Loup
Il se surprend en imaginant, parce qu’il était persuadé que tout ça, ça s’était enfui.
(Tu veux devenir ma chanson préférée ?)
La chanson qui nous transcende
La chanson qui passe en boucle et qu’on aime apprendre par coeur
Il ne veut juste pas
s’en lasser
s’enlacer
Se laisser avoir
Se laisser aller

- Cap. Mais c’était mon tour alors j’ai le droit à deux cap en échange.

- Tu penses avoir le droit de marchander, petite chose ?

Maintenant que la situation se resserre davantage dans ses mains, qu’il a un peu plus le contrôle sur Elea, il lâche un petit soupir.
Loup on ne lui a pas appris à aimer
Il aime un peu à l’envers
Et aimer à l’envers ça done remia
On est d’accord, remia ce n’est pas beau
(Ou pas autant que l’amour en tout cas)

- Elea. Toi, cap ou pas cap de me donner le tien ?

Un sourire se dessine (et cette fois-ci pas de travers) sur son visage. C’est le sien, son air enfantin qui le dessine avec un crayon, il en est presque sûr.
(Pas possible autrement)

- Non, pas cap. Enchanté Elea, c’est très joli. Il a une origine ?

- La solitude, c’est ce genre de pute qui t’attend au détour d’une rue. Elle est toujours là, quelque part.

Elea elle aimerait bien monter dans son vaisseau à lui, disparaitre avec lui, loin du monde des adultes. Là où solitude ne la retrouvera jamais. Solitude est une pute. (Tu le penses vraiment ?) Elle aimerait bien Elea que Loup ne soit pas seulement le mirage d’une nuit. Alors on a qu’à prendre une autre rue, celle qui est sombre et qui fait peur. Peut-être que là-bas elle n’osera pas nous suivre ou nous attendre.
Peut-être qu’au fond solitude n’est qu’une enfant perdue (comme elle). Peut-être que solitude ne fait que chercher de la compagnie.
Elea elle est reste enfant, a bien trop peur du noir (alors elle dort souvent avec la lumière allumée), a bien trop peur de se retrouver seule.
Puis il ya lui, lui qui n’a pas l’air d’avoir peur et Elea elle redevient gamine quand ses mots se mêlent au vent.
Elea est une enfant, refuse de grandir et s'accroche à Peter Pan.

- On ne peut pas s’ennuyer en étant invisible et je ne pense pas que l’on puisse non plus se sentir seul. Ce n’est pas parce que tu ne peux plus parler avec les gens que tu ne peux plus les observer et c’est peut-être là salutaire que de pouvoir (enfin) observer en silence. Ecouter en silence. Enfin, écouter vraiment, tu vois ? J’pense qu’à l’heure actuelle, les gens passent plus de temps à s’dire ce qu’ils vont rétorquer qu’à vraiment boire les propos de leurs interlocuteurs. Alors je trouve que ça serait une aubaine que d’être présent dans la vie des gens sans qu’ils n’attendent rien de toi… puisqu’ils ne te voient pas.

Peut-être que tu as raison pour l’ennui et la solitude, que ça ne nous touche pas quand on est invisible mais… je crois qu’au fond ça me fait peur d’écouter vraiment, d’entendre comme si je venais de me réveiller de plusieurs années passées dans la surdité. On s’cache tous derrière tout ça, les mensonges et les banalités qu’on s’échange, les phrases qu’on n’écoute pas vraiment parce qu’on ne veut pas, parce qu’on se protège inconsciemment. Ça m’fait peur de ne pouvoir qu’observer, j’ai peur d’entendre et de comprendre vraiment, de n’avoir plus personne à qui prendre la main la nuit quand les mots feront mal.(C’est pour ça que je veux que tu m’accompagnes dans ce monde).
Elea elle a peur de grandir.
Elle se fera souris la journée, observera le monde de son côté en savourant la beauté du silence.
Elle se glissera près de lui la nuit, sans un mot, si la beauté devient grisée. Dans son monde. Là où elle ne devrait pas être, là où sans savoir pourquoi elle se surprend à vouloir être.
Elea ce sont des bouts de cœur qu’elle laisse sur le bitume, lui n’aura qu’à les suivre si leurs chemins se séparent, n’aura qu’à les ramasser et les garder pour lui s’il en a envie. Il a l’arme, elle lui donne les balles. Et si un jour elle se demande quand est-ce que les choses sont parties en vrille, elle repensera à cette nuit, à leurs âmes vagabondes dans les rues, à la paille et à la trace qui disparait. A l’arme qu’elle charge pour lui. Il n’aura plus qu’à appuyer sur la gâchette pour tout détruire. La détruire. Elle ne s’en rend pas compte pourtant. Sourire amusé par-dessus l’épaule, cherche son visage jamais très loin.

- Tu penses avoir le droit de marchander, petite chose ?

Faudrait qu’elle cligne fort des yeux Elea, comme le clic d’un appareil photo, comme pour garder en mémoire ce souvenir et ne jamais appuyer sur supprimer. J’me le suis donné. Elle hausse les épaules et l’image de son sourire grandit toujours plus, joue du bout des doigts avec le guidon du vélo.

- Non, pas cap. Enchanté Elea, c’est très joli. Il a une origine ?

Elea. Ça s’envole dans les airs, ça lui parait être un morceau insignifiant pour la décrire, quatre lettres que ses parents trouvaient jolies mises bout à bout. Des lettres qu’il ne lui partage pas, fait apparaître une moue sur son visage. J’imagine qu’il doit en avoir une mais je ne la connais pas. Je suppose juste que ce n’est pas anglais, parce que là-bas j’en connais pas d’autre. Son regard croise le sien, la curiosité piquée. J’pensais pas que tu allais chuter à un cap ou pas cap aussi simple. Mais c’est pas grave, si tu me donnes pas le tien j’peux t’en donner un nouveau, mais tu seras obligé de le garder. Cap ou pas cap entre les lignes. Sourire enfantin et le vent de liberté comme une claque au visage.
Elea est une enfant, gamine comme au premier jour.
La question à peine posée qu’un cap s’échappe de ses lippes, son rire s’élevant dans les airs. Il n’y a qu’eux, lui, elle, la maison bourgeoise. Cap. Il veillera sur elle (pas vrai ?). Elle veillera sur lui (elle fait la promesse du petit doigt). Tu m’aides ? Ses doigts glissent entre les grilles qu’elle s’apprête à escalader, son regard allant vers son compagnon puis vers la maison.

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j'en ai marre de faire semblant
j'en ai marre de faire comme si tout me glissait dessus
j'en peux plus d'entendre les sirènes
Même à travers le double vitrage
≡ e l o u p

Loup, il aimerait bien glisser ses mains près de son coeur, les ranger et ne plus jamais les employer.

Dis-moi, c’est possible ?
Est-ce que tu le veux, comme moi ?
Que mon coeur batte à tout rompre pour toi,
qu’on s’envole comme des oiseaux,
dans les jolis cieux,
juste toi et moi,
parce que toi sans moi ça rimerait à quoi ?

Pourtant, y a Stella qui loge dans un coin de sa tête, encore, toujours. Peut-être parce qu’elles se ressemblent, d’une certaine manière, il n’y avait qu’elle qui parvenait à faire battre son coeur aussi vite, aussi fort, qui lui provoquait des montagnes russes dans tout son corps, qui faisait des tornades dans son esprit, qui faisait vibrer son échine. Elle, qui semble comme un oiseau, inatteignable mais toujours en attente qu’on allume sa mèche, sa mèche qui lui fera péter les plombs, déraper, patauger. Qui lui fera perdre la tête dans les galaxies, prête à ce qu’on ne la retrouve pas, prête à tout abandonner là, maintenant. Comme ça.
Parce que même si la vie ne tient qu’à un fil, elles, elles ont appris à coudre et à chaque fois, elles arrivent à réparer les pots cassés, ne les jettent pas, admirent les fissures et s’acharnent à réparer.
Jusqu’à ce qu’il soit trop tard.
Bombe à retardement. Là-dessus, ils ont tous les trois un point commun.

n’est-ce pas, stella ?
depuis que je te connais, t’as toujours été comme ça
comme l’eau qui s’échappe entre les doigts
comme un bout de verre qui coupe aussi, quand on veut le ramasser pour le mettre à la poubelle
parce que t’es le genre de personnalité que l’on ne peut pas oublier
mettre de côté
omettre
tout simplement.
toi, on ne peut pas te mettre de côté.
t’es toujours au centre.

Elea a ce truc.
Ce truc qui fait que ça tourne la tête de Loup et il est quasiment certain que ce ne sont pas les effets de l’alcool, ni de la coke qu’il sniffe, sniffe, sniffe.
Tout le temps.

- Alors on a qu’à prendre une autre rue, celle qui est sombre et qui fait peur. Peut-être que là-bas elle n’osera pas nous suivre ou nous attendre.

- J’sais pas, j’ai pas de GPS à démons je t’avoue. Tu veux bien m’aider à le construire ?

Pour arrêter d’avoir peur, pour arrêter de baisser le regard quand on est dans la rue. Pour pouvoir les trouver et enfin les arrêter, leur passer les menottes, les enfermer derrière des grilles en tentant qu’ils ne s’échappent pas. Condamnés. Condamnés à errer.
Et étrangement, Loup, il se sent là tout de suite comme ces démons qu’il tente de vaincre, comme ceux qu’il tente de fuir.
(Tu ne me l’avais jamais dit, Stella,
p o u r q u o i ?)

- Peut-être que tu as raison pour l’ennui et la solitude, que ça ne nous touche pas quand on est invisible mais… je crois qu’au fond ça me fait peur d’écouter vraiment, d’entendre comme si je venais de me réveiller de plusieurs années passées dans la surdité. On s’cache tous derrière tout ça, les mensonges et les banalités qu’on s’échange, les phrases qu’on n’écoute pas vraiment parce qu’on ne veut pas, parce qu’on se protège inconsciemment. Ça m’fait peur de ne pouvoir qu’observer, j’ai peur d’entendre et de comprendre vraiment, de n’avoir plus personne à qui prendre la main la nuit quand les mots feront mal.

- T’es certaine que c’est dans la surdité ? Ce ne serait pas dans l’absurdité… ? Parce que ce que tu me décris, dans le fond, c’est exactement ça : l’absurdité de la vie. De l’existence. Savoir que l’on n’existe pour un but final inexistant, que l’on n’est que poussière. Que l’on retournera poussière et dans le fond, c’est la seule certitude de la vie. Les autres, à côté, c’est juste nous qui les créons. Et à tord, sans doute. Donc en soit, toi, tu préfères vivre dans l’ombre de tout, plutôt que d’être dans le soleil pour rien. J’pense qu’il y a une subtilité à prendre en compte. J’préfère être dans le soleil, personnellement. Et être éveillé des choses. Fermer les yeux pour moi serait inconcevable.

Parce que c’est ça, pas vrai ? Avoir la force de continuer et de ne juste pas succomber ? De ne pas se laisser avoir, de ne pas flancher ? De ne pas se suicider ?

j’ai toujours cru que c’est ce que tu ferais stella,
que tu finirais par te suicider mais que dans ta tête,
ça n’apparaitrait pas comme ça.
que tu donnerais un sens nouveau à cette morte soudaine,
t’y apporterais un côté poétique.
inespéré.
dis, tu partiras jamais comme ça, hein ?
j’ai besoin de toi.

- J’me le suis donné.

Et cette phrase suscite un nouvel intérêt pour l’énigme qu’est Elea, pour la manière dont elle se montre, dont la manière dont elle a voulu bâtir un mur (un monde ?) entre elle, et le reste à côté. Subitement, il se sent fasciné par cette personne qui lui est, pourtant, toujours inconnue.

- J’pensais pas que tu allais chuter à un cap ou pas cap aussi simple. Mais c’est pas grave, si tu me donnes pas le tien j’peux t’en donner un nouveau, mais tu seras obligé de le garder.

- Pas de soucis, ma jolie. Je préfère maintenir l’anonymat. Donc je t’écoute. Quel est ce fameux nouveau cap ?

Il se met à rigoler. Il en a presque mal au entre, à force de ne plus avoir eu l’habitude de le faire. C’est ça qu’on dit, non ? Avoir mal aux abdos, aux joues, quand on rigole/sourit trop ? Quelle étrange sensation, qu’il se dit. C’est agréable. Autant que le parfum d’Elea qui se dégage de ses cheveux au vent, là, sur leur vélo. Prêts pour des aventures inédites, prêts pour des aventures interdites.
Il quitte le vélo, pose son regard sur Elea, prête à s'envoler comme un oiseau, s'enfoncer dans les aléas.

- Tu m’aides ?

Il hoche la tête, requête d'une âme en perdition, actions d'âmes égarées. Il l'aide à passer le grillage, aiguillage vers la maison du mal, dans ce climat astral, il aimerait bien fermer les paupières, qu'il arrête le temps avant de se retrouver dans un cimetière, profiter encore longtemps de se sentir vivant, accablante que cette vérité qui ne devrait pas trop tarder.
Il s'avance à petits pas vers la maison, dans la déraison, attrapant sa main dans leur quête, de cette nouvelle conquête qu'il n'aimerait jamais oublier.

- Viens, on fait le tour pour voir s'il n'y a rien d'ouvert.

Il espère qu'une fenêtre le soit mais en attendant il profite de sa peau douceur soie.