bleeding and bruised - gaïa

bleeding, bruised, and breathless

but still standing

ft @Gaia Andreani

Il existe un univers où là, à cet instant, t’es posée sous un palmier. Allongée à même le sable blanc, tes yeux sont fermés. Quelques rayons de soleil parviennent à passer le feuillage. Ils te caressent la peau. Et toi, sans rechigner, par cette douceur tu te laisses posséder. La mer – ou l’océan, t’es pas certaine – est calme et sans ride. À l’image des vagues lisses et de leur mélodie timide. C’est à peine perceptible, mais t’en discernes assez pour pouvoir te laisser bercer. Ainsi, pour réciproquer, tu tends une main affectueuse vers cette vaste étendue sablée. Sauf que voilà, les dunes sont d’venues bitume. Et toi, t'es d’r’tour dans la réalité. Réalité dans laquelle, à cet instant, t’es à terre dans une allée. Fraîchement tabassée. Étalée sur tout ton long, sous tes doigts tu sens l’goudron. (c’est froid et rugueux au toucher). À ce stade, même pas b’soin d’ouvrir les yeux pour voir qu’l’soleil s’est fait la malle. D’ailleurs, c’pas l’seul aux abonnés absents. Non, y’a aussi la berceuse marine qui a disparu, remplacé par l’bruit exaspérant des passants et des klaxons. Un sentiment d’amertume te submerge. Presque identique à celui qu't'as les fois où tu t’réveilles prématurément d'un rêve. Ces nuits-là, y'a plus qu'un seul désir : te rendormir pour t’y blottir. Mais comme toujours, fermer les yeux est tentative stérile. L'rêve est d’jà loin et hors de portée. Ici, situation kif-kif. Malgré qu’t’aies envie de disparaître, de voyager entre les dimensions pour retourner sur cette plage idyllique, t’es bloquée ici. (wherever "here" is. quoique, ton dernier souvenir est celui d’une impasse vide à l’abri des regards, et ça malgré l’affluence d'la rue d’à côté). Résignée, tu tentes d’ouvrir les yeux, histoire d’t’localiser, d’voir dans quel pétrin cette fois tu t’es fourrée. Péniblement, tu réussis à soulever tes paupières. Reste qu’l’monde est flouté, à la façon d’une chaîne cryptée. Tu discernes que dalle. Faudra donc patienter quelques minutes pour qu'ta vue daigne se manifester. Et comme prédit, elle le fait. L’truc c’est que, traîtresse, elle s’fait accompagnée d’une bonne grosse céphalée. Là, face à la douleur, tu n’peux que grogner. Ils t’ont pas raté ces connards. Mais ta tête n’est pas seule à avoir pris cher, l’reste du corps ne s’porte pas mieux. Saignement d’nez, bosses, égratignures, ecchymoses ... encore sur l'dos, t’essaies de faire l’constat des dégâts. Tu réalises quand même que, certes t’as connu des jours meilleurs mais dieu, que ça aurait pu être pire ! Au moins là, on t’a pas plantée, ni laissée pour morte dans cette impasse malfamée. D'autant que personne ne t’aurait trouvée. Maintenant encore – alors que t'avais perdu connaissance assez longtemps pour qu'les autres déguerpissent – personne n’a remarqué qu’t'étais là, gisante sous leur nez. C'est pas plus mal, tu raisonnes. Aucun témoin à cette humiliation dégradante. D'ailleurs faudrait pas s'éterniser ici. La première tentative pour t’relever sur les coudes se solde par un échec. Un second grognement en profite pour s'échapper. Putain, t'as mal partout. Les muscles, les os. De la tête aux pieds, t'es pétée ! Tu persistes malgré tout à te redresser. C’est à c’moment que tu la sens, cette goutte victime d'la gravité. Elle fait son bout d’chemin, détalant sur ta tempe. Et sans même l’avoir touché, tu sais déjà qu’c’est une goutte teintée.

Made by Neon Demon

la journée avait été longue mais intéressante et partant de ce fait avéré, elle préférait évidemment s'appuyer sur le positif qui en ressortait gaia. elle n'était pas du genre à se plaindre, ni à se compliquer la vie en se complaisant dans des coups du sort qui l'impactaient plus ou moins durement. au contraire, elle savait se satisfaire de peu de choses. malgré tout ce qu'elle avait pu endurer depuis sa naissance, elle gardait la face, elle continuait d'affronter les épreuves de la vie avec une facilité plutôt variable. et aujourd'hui, plutôt que de se rendre à son poste d'infirmière à l'hôpital, elle avait été sommé de participer à une conférence sur les risques d'infection liés au soin. elle avait appris un tas d'infos et elle comptait bien les garder précieusement pour s'en resservir plus tard, si l'occasion se présentait. les heures s'étaient écouler, elle avait passé un moment sympa en compagnie de quelques collègues et du professionnel qui leur avait permis de ressortir plus intelligents de l'endroit et elle avait fini la soirée avec ceux qu'elle côtoyait au boulot tous les jours de la semaine. elle partait du principe que ça ne pouvait pas faire de ma à une équipe de se voir en dehors du lieu de travail, dans un contexte différent, qui favoriserait la création de liens un peu plus profonds.
un verre et un restaurant partagés plus tard, elle se retrouvait à l'extérieur, l'esprit léger et le sourire aux lèvres. ça lui avait fait un bien fou de décompresser et ce petit air frais nocturne la revigorait dans le même temps. elle arpente la rue jusqu'à retrouver sa voiture pour s'y engouffrer au plus vite, étant donné que sa seule hâte à cet instant était de retrouver son lit. que ce soit sa chaleur ou son confort d'ailleurs. elle avait envie de se laisser complètement dans les bras de morphée, pour ne se réveiller qu'au petit matin. fraîche et prête à affronter un nouveau jour et son lot de surprises. mais pour l'heure, c'était les imprévus de la soirée qu'elle allait devoir gérer. elle allait même devoir le faire le plus rapidement possible si elle voulait venir en aide à la jeune femme bien amochée qu'elle venait de croiser sur son chemin. elle n'aperçoit même pas la couleur de ses yeux tant ses paupières peinent à s'entrouvrir. il y a des bleus, des écorchures, des traces de sang... la panoplie de quelqu'un que l'on n'avait pas épargné, pour une raison qui lui échappait encore. n'écoutant que son âme d'infirmière et de super-héroïne qui refuse de laisser un être sans défense livré à lui-même, elle s'approche de la victime et s'accroupit à sa hauteur. mademoiselle, vous m'entendez ? elle essaie de lui prendre la main, délicatement. d'un geste doux, pas pressant, qui ne lui fera pas croire à une énième attaque. elle cherche à lui faire comprendre qu'elle ne lui veut aucun mal, et qu'elle est désormais en sécurité. c'est ce qu'elle va s'efforcer de faire gaia, la maintenir à l'écart du cauchemar qu'elle avait dû vivre cette nuit-là. tout va bien, j'vais vous aider. elle tente tant bien que mal de la soulever par l'arrière, de manière à ce qu'elle se trouve un mieux assise plutôt que négligemment allongée sur un trottoir. elle veut l'aider à se sentir bien, se sentir mieux. elle veut l'aider à guérir et comprendre ce qui avait bien pu lui arriver. elle est déjà trop dans le questionnement gaia. les interrogations s'accumulent et se chevauchent dans son esprit. elle vrille complètement de n'avoir aucune réponse à leur apporter. alors elle fera preuve de patience, pour le bien de la jeune femme, pour ne pas la brusquer et risquer de la braquer. c'était vraiment la dernière chose dont elle avait besoin.