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 sous les décombres — Wes

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sous les décombres — Wes Empty
Message Sujet: sous les décombres — Wes   sous les décombres — Wes Empty Ven 27 Nov - 14:01


sous les décombres
Un rien lui tirait des yeux une rivière : elle avait le don des larmes.

Sortir au-delà des murs porteurs, tenter de reprendre contact avec une vie qui ne pourrait semblait plus décalée de celle qu’elle traverse à présent. Elle ne s’est que rarement bercée des « Maman et Papa auraient voulus que … » car la culpabilité de n’avoir pu sauver sa mère des flammes, son père de la ténébreuse fumée, l’enferme encore dans un cocon sournois où elle se revoit titubante dans ce long couloir qui, autrefois, laissait briller les flammes d’admirations des moindres invités s’introduisant dans le paradis mordoré de la famille Black. Il y avait quelque chose du domaine du voyeurisme qui se dessinait dans ce décor où elle semblait être une tache noire sur des moulures pigmentés de feuilles d’or, une fille de la plèbe habillée de ses plus beaux atours pour charmer les convives. Elle a apprit la politesse et les jolis mots, les douces paroles de miel cachant le fiel et la bienséance hypocrite, un monde dans lequel elle se retrouvait engoncé, où peu de gens pouvait comprendre qu’alors, elle n’était pas la plus heureuse en ce monde de faux semblants où il fallait dire que l’on était heureux malgré nos brisures, que l’argent faisait le bonheur, qu’il était impensable qu’être riches ne puissent pas nous amener une joie quotidienne qui ne pourrait jamais s’étioler. Elle voyait pourtant l’envers du décor, le couple Black qui avait beau s’aimer, il n’y avait que peu de chaleur entre eux, que des étreintes amicales, de plus en plus, que des regards qui n’osaient se dire « je t’aime mais je ne sais plus comment », des baisers bien chastes. Elle a vu sa mère jouer l’hôte parfaite alors même que les larmes lui souillaient les joues quelques heures auparavant, son père broyer ses pensées noires mais rire aux côtés de ce qu’ils osaient appeler amis. Parfois, quelques fois comme ce soir où elle s’embarque dans la profonde fourmilière menante au métro, elle haïrait presque le monde dans lequel elle a longuement fait semblant, où elle semblait être l’inatteignable diamant Black, l’intouchable que son père ne voyait pas se marier, pas encore, pas encore car il fallait qu’elle reste pure pour l’union concrète, pour le parfait époux qu’on lui choisirait. Prisonnière d’une tour d’or, elle a vécu dans l’univers abominable des hautes sphères que les prolétaires se perdent parfois à admirer sans se douter que sous les lourds rideaux pourpres de velours se cachent une stupide humanité, de vieilles traditions qui pourrissent les âmes qui ne peuvent s’extirper de ce royaume où les règles ne peuvent être brisées. Et si elle s’y est parfois aventuré, elle n’a plus eu l’envie de voir la déception morose dans les yeux de sa mère, les plis amers s’intensifier aux coins des lèvres de son père aux cheveux bien grisonnants.

Elle s’est promis de les rendre fiers d’un jour l’avoir choisie pour fille, elle, que sa propre mère d’origine n’avait pas voulu. Portée pendant neufs longs mois qui n’ont pas convaincus cette femme qui ne porte que le nom de « X » de l’aimer, rien qu’un peu. Le nourrisson n’a pu que peu goûter le lait de sa douce mère au visage creusé par la misère, par la perdition, par la drogue, miré par ses yeux qui oscillaient entre dégoût et tendresse. Elle ne pouvait être mère, elle ne pouvait s’y résigner mais Cosima ne le saura certainement jamais. Elle s’engonce, vêtue du mauve d’un jean cachant la cuisse blasphémé par les lacérations des langues des feux-follets, de ce long pull qui ne pourrait laisser voir l’immondice qui s’y cache et qu’elle ne démontrera plus à personne. Le carré des cheveux d’encre oscille autour de son visage impassible, souriant à peine, semblant toujours pensive, plongée dans le marasme de ses ruminations. Elle appréhende la rencontre avec cette amie qu’elle devait bien se résoudre à voir un jour, une belle de jour, une fille au sang d’or, fille de Midas. Elle était la plus douce avec elle et ces quelques messages échangés qui lui ont valus l’envie de se lancer dans une rencontre, quelques condoléances encore écrites sous l’écran qu’elle aurait aimé briser pour ne pas avoir à lire des mots vides. Elle sait que la douleur n’y est pas, que lorsque le deuil ne touche pas vraiment l’environnement des endeuillés, eux, persistent à avoir mal.

La mort frappe mais si elle parvient à mettre, le temps de quelques jours, le temps sur pause, la vie reprend, la douleur s’estompe pour les non-proches et ils oublient qu’une partie de quelqu’un s’en est allée. Ses yeux ne se sont pas alourdis de larmes comme autrefois, ses joues n’ont pas rougies comme chaque fois que la haine lui vient, son nez est resté intact d’humidité, elle n’a pas beuglée sa haine contre le monde entier car de toute manière, la défonce est présente. Les paupières presque lourdes, elle s’enfonce dans le carcan d’acier du métro où elle découvre une rame presque vide, croise le regard sombre d’un éphèbe sur lequel elle refuse de s’attarder, se pose en face de lui dans un bruit sourd, étendant sa jambe bien raide en faisant mine que ce n’est qu’une pose nonchalante quand la douleur irradie encore, que les chairs tiraillent. Les lueurs blafardes des néons au-dessus d’eux cliquètent et la vitesse les surprend en les entrainant bien au loin de leurs quartiers. Un écouteur plongé dans une oreille, elle entend les notes mélancoliques d’un violon assassiné le temps qui passe, l’entraîne dans une horde de sentiments contradictoires, qui donnerait bien envie de rire et de pleurer tout à la fois, qui la ramène aux mauvaises souvenances, qui lui serre la gorge et la voilà qui se voit prête à craquer, ici, à cause d’une musique qui frappe le cœur comme elle sait si bien le faire. Sensible aux notes, l’envie de s’effondrer lui tombe sur le râble, tristesse bien lâche qui menace de lui faire faire demi-tour. Elle ne peut pas. Elle ne peut pas faire face à un visage qui la ferait revenir à un temps où, alors, elle pensait avoir une famille et être intouchable. Car les drames n’arrivent qu’aux autres, que notre vie ait été pourrie avant n’y change parfois rien. Prête à s’élever, l’acide de quelques larmes slalomant sur les rives de ses yeux cernés, elle se retient brutalement à la barre d’acier près d’elle quand le métro cesse de bouger. Quelques voix s’élèvent, bouleversées et dans un balbutiement de paupières, quelques larmes viennent s’échouer sur son visage. Prête à les effacer d’un mouvement de manches, elle est presque reconnaissante à la lumière qui peinait à rester éveillée de s’éteindre brutalement, ne laissant que le rouge des lueurs de secours éclairer les silhouettes des quelques rares personnes présentes dans le wagon. « Fais chier … » un murmure qui ne recouvre qu’à peine les dialogues des trois autres passagers alarmés par cet arrêt brutal. Elle hait les pannes, hait que la nuit l’entoure et peut-être qu’elle soupire son anxiété en lâchant peu à peu la barre de ses phalanges gantées de cuir, jetant un coup d’œil à la silhouette masculine qui lui faisait face depuis le début du trajet, comme pour communiquer par ces regards qui n’osent pas dire que la peur pourrait bien être là, rassurer, aider, peu importe car le noir les englobe tout à coup et aucune voix ne vient rassurer les naufragés des sous-terrains. Sentant encore le sel dégouliner sur ses joues, elle lui offre presque un visage d’enfant effrayée, détournant la tête pour tenter de trouver une échappatoire, sans se soucier de rassurer quiconque, les notes de violons continuant à se jouer en boucle dans l’écouteur planté dans son oreille tandis qu’elle se lève pour tenter de trouver une porte de sortie, évitant de peu une femme qui peste en tapant férocement contre l’écran de son portable ne semblant rien capter d’autres que le staccato agacé de ses longs ongles vernis.

Le bateau s’est arrêté et les voilà prisonniers du béton.
Belle excuse pour ne pas avoir à faire face au passé.



(c) corvidae
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