We are the same - Meg

Il soupirait, gardant cette lettre précieuse dans ses mains. Relisant encore inlassablement les lignes qui la composaient. L’idée qu’elle soit sa dernière lettre le rendait fébrile, incertains alors que son cœur se serrait. A peine quelques jours qu’il avait appris et le mal le rongeait. Comme un membre qu’on lui avait arraché, il n’avait de cesse de sentir cette douleur, si profonde, si silencieuse… il pliait avec minutie le morceau de papier. Repensant encore à ces mots brusques, ces échanges houleux avec ses anciens amis. Anciens… le terme le rendait amère, lui qui avait tant partagé avec eux. Le temps avait fini par les abîmer, la prison les séparer. Incapable de leur pardonner, Jeyden restait buté sur ses idées. Coupable de ne pas accepter que son ami… avait disparu. Il avait du temps libre devant lui, une nouvelle liberté qu’il retrouvait. Et pourtant c’est dans ses tourments qu’il alla s’enfermer. Se rendant là où seul son cœur avait envie d’être. Face à lui, ce nom gravé sur la pierre… le temps était maussade, tout comme son esprit. Son humeur si délicate, ses mains tremblantes alors qu’il regardait Matthew… il laissa échapper un soupire, sans trouver la force de dire quoique ce soit. Pourtant, il savait, il fallait parler. Dire quelque chose… parce-que dans ses rêves il le voyait encore. Dans ses rêves il avait pu entendre le son de sa voix. La mélodie de son rire était encore présente. Il le revoyait lui, son sourire accroché à ses lèvres, son regard qu’il posait sur lui. Matt avait toujours cette fossette au coin de sa joue qui faisait fondre le cœur de toutes les filles. Mais le sien était déjà pris… envahi par une fille qui ne méritait pas le centième de l’amour qu’il avait a donné. Ses pensées s’égaraient encore vers elle, quand il serait le poing. La dernière fois qu’il l’avait vu c’était ici. Elle avait osé… Jeyden la jugeait responsable. Fautive de ce qui était arrivé à Matt. S’il ne l’avait pas entrainé dans ces frasques, jamais ! Jamais il ne serait mort. Et cette colère le rendait pitoyable. Surement plus que l’ombre de lui-même. Mais il ne supportait pas l’idée que Matthew ait perdu la vie pour… une fille. Nouveau soupire, plus lourd cette fois alors qu’il fixait de nouveau ce nom si familier. « Je… suis désolé… » Enfin il osait dire quelques mots à cet ami qui lui manquait. Que lui dire de plus ? A part… « Tu me manques tellement… » Pas une larme qui venait embuée ses yeux. Jeyden était impassible. Presque insensible à ce qui était arrivé. Et pourtant il était triste… si peiné qu’il n’arrivait à l’exprimer, qu’il n’en dormait plus la nuit. Mais jamais il n’aurait montré un signe de faiblesse. Parce-que la prison avait eu raison de lui. Parce qu’il avait appris à ravaler ses émotions. Qu’est-ce que ça changerait ? Tu n’es plus là de toute façon… il le pensait encore, sans avoir la force de rester plus longtemps. Il laissait échapper un nouveau soupir, tournais des talons sans avoir l’audace de lui parler réellement. Et sur son chemin, il croisa quelqu’un. Une silhouette à laquelle il ne s’attendait pas. Dans l’allée, il releva les yeux… y croisa ce regard, surement le même que le sien en cet instant. Tristesse certaine, d’une perte à laquelle aucun des deux ne s’attendaient. Quelques secondes à la fixer, mais il savait… que quelque chose le touchait. « Il s’appelait Matt… » Lâchait-il simplement. Comme une confession à laquelle il cédait trop vite. Il la regardait, sans savoir qui elle était, mais il savait que la peine qu’elle avait été la même que la sienne. Et comme un signe du destin, il se mit à pleuvoir…

Un ami, oui il l’était. Comme un frère même… et ces mots le font frissonner, alors qu’il se rend compte que plus rien ne sera jamais comme avant. Dans ses yeux il se perd, y voit son propre reflet. Elle est pourtant si loin, inconnue, mais il a l’impression que quelque chose les lie désormais. Il ne cherche aucune réponse à ces pensées qui se bousculent. Il ne prend pas peur non plus. C’était écrit, aujourd’hui il devait la rencontrer. « Depuis mes dix-sept ans… » Laissait-il échapper. Une des meilleures époques de sa vie. Celle de l’insouciance et de l’inconscience collective. Ces doux moments qu’il avait partagé avec lui, le marquait encore. De cette plume douce et euphorisante… il n’avait qu’à fermer les yeux pour se souvenir de lui. « Je ne l’avais pas vu depuis trois ans… » Et il le revoyait ici. La douleur était forte. Encore trop présente à ses yeux. Il aurait pu s’en vouloir d’être faible face à cette inconnue. Mais il ne craignait rien. Tout ici resterait secret. Il en était persuadé, se laissant approcher lentement d’elle. Il n’irait pas plus loin, pour ne pas être intrusif et parce-que lui-même craignait d’être proche des gens. Il ne sentait plus rien, comme un flottement dans l’air. Un instant de répit, alors que la pluie s’abattait lentement sur lui. Elle n’était pas dérangeante, juste mélodieuse. « Et toi ? » lâchait-il sans réfléchir. Il aurait pu la vouvoyer parce qu’il ne la connaissait pas. Mais leurs cœurs criaient la même douleur. Ils étaient sur un point d’égalité. Alors il prenait ses aises avec elle, osait lui poser cette question. Il ne voulait pas la forcer, elle n’était pas obligée d’y répondre. Triste, il baissait la tête lentement… « Je n’arrive pas… à lui parler… » Parce-que le faire c’est accepter qu’il ne soit plus là. C’est ce qu’il croit, alors que la plaie de son cœur se met à saigner. Il ne sait pas si pour elle c’est pareil. Si elle se retrouve de longues minutes ici, sans savoir quoi faire. Lui est souvent envahi de souvenirs. Des plus vieux, des derniers qu’ils ont vécus ensembles. J’aimerais avoir la force de lui parler, de lui dire que je suis tellement désolé. Que tout ça ne serait jamais arrivé si j’avais été là. Aucun mauvais sentiment, juste une volonté de changer ce qui était arrivé.