Une douce rencontre Ft. Sally

UNE DOUCE RENCONTRE

Un an, c'est ce que le médecin a décidé quand il a abattu ses espoirs en quelques mots. Une échéance programmée par un inconnu, simple supposition pour un rendez-vous avec la faucheuse. Peut-être quelques mois de plus ou de moins, mais l'issue reste la même. La mort, sa silhouette arrachée à un monde qu'elle chérit à sa manière. Son coeur reste volage, elle dépose des impressions de bonheur pour s'évaporer au petit matin, comme pour préparer les inconnus à ce qui les attend. Fée solaire et solitaire, elle refuse d'entrainer des âmes supplémentaires dans sa chute vertigineuse sans être capable de se priver des plaisirs charnels. C'est la contradiction incarnée qui se perd dans les allées du parc, elle offre son sourire sans rien attendre en retour, laisse le soleil réchauffer sa peau fragilisée par la maladie sans penser au minuteur qui s'emballe dans sa poitrine. Et puis le choc. Physique comme psychologique. La gorge qui se noue presque instantanément. Elle n'a pas besoin de relever les yeux pour deviner la présence trop proche. Lui, il a adouci l'unique nuit passée en sa compagnie, il n'a pas posé de questions sur la fragilité évidente de la fleur. Lui qu'elle a fui comme tous les autres, fermant les pupilles océans sur les messages reçus pour mieux le protéger, se couvrir elle-même aussi en ignorant le myocarde agité. Il fallait que ce soit lui, qui la percute de plein fouet pour mieux revenir dans son existence. Les cinq lettres de son prénom prononcées, comme pour confirmer le coup du destin. La culpabilité ne met pas longtemps à s'envoler pour laisser place à un sourire plus réservé, une retenue nécessaire pour ne pas se laisser envoûter une nouvelle fois. Naïve, l'estomac retourné par l'émotion secrète. « Wayatte.. Je ne m'attendais pas à te revoir. » Pas ici, pas dans ces conditions, pas avant d'avoir pu oublier. Un pas en arrière lui permet de mieux le considérer, une main dans sa crinière dorée pour dissimuler la gêne des retrouvailles après l'échappée belle. « Comment vas-tu ? » Simple courtoisie alors qu'entre ses côtes la barrière tente de se remettre en place. Incapable d'autoriser son coeur à battre pour de nouvelles personnes alors que l'ombre plane en continu au-dessus de sa tête.

(c) élissan.

UNE DOUCE RENCONTRE

Il y a des règles qu'elle s'est imposée depuis l'annonce de sa maladie, comme celle de ne plus se laisser bercer par des bras masculins. Ce n'est pas pour son propre bien, mais pour celui des autres. Incapable d'infliger un futur deuil à des hommes qui méritent plus qu'une douceur brisée en mille morceaux. Es-tu vraiment heureuse là ? Les tripes en vrac, à lutter contre un coeur qui cogne douloureusement. Non. Mais Sally elle étincelle quand même, s'épanouit dans ce nouveau rôle aussi beau que tragique. A l'image de son existence. C'est toujours trop court quand elle apparait, la fin sonne avant le réel commencement. Beauté éphémère, ses iris ne sont jamais las de voir des sourires s'afficher sur les minois inconnus, peu importe si ce n'est que pour quelques instants volés qui deviennent des jolis souvenirs au petit matin. Wayatte fait partie de cette catégorie, celle des belles histoires qui ont éloigné les pensées brumeuses grâce à la chaleur de deux corps enlacés. C'est tout ce qu'il est. Il devrait fuir, mais il reste, bien décidé à relancer une conversation essoufflée dès l'unique soir. Sur le visage de Sally, il peut lire la gêne et l'envie de fuir. S'évader loin des ressentis qui naissent, loin de cette personne qui l'attire en ignorant la raison de sa lâcheté. Elle n'est pas comme les autres la blonde, incapable d'aimer autrement que de travers, trop égoïste pour offrir du bonheur à une seule personne et le coeur trop grand qui s'attache malgré les bonnes résolutions. Coeur chewing-gum. « Tout va bien, merci. » Le sourire se détend assez pour devenir plus doux, apaisant un peu le vacarme intérieur. Un silence s'installe, elle ne sait pas quoi dire face à celui qu'elle aimerait considérer comme un mirage lointain. « Écoute, je suis désolé pour l'autre soir. Sache juste que tu n'es coupable de rien, d'accord ? » Seulement coupable d'avoir bouleversé les codes mis en place, mais elle se garde bien de lui avouer. Elle se demande sincèrement ce qui se trame dans les méandres de Wayatte. Bon ou mauvais souvenir, rancune ou désir de revenir à l'attaque.

(c) élissan.