one punch. (slade)

Voilà un rituel bien encré, routine trois fois par se perdre d’aller dans les méandres d’une salle un peu paumée au cœur de la Grosse Pomme. D’aller extérioriser tout ce qui grignote les humeurs et le cœur, d’aller se réchauffer les muscles au cœur du ring, aller s’écorcher les phalanges avec d’autres inconnus. Y avais pas d’occupations en taule t’as trouvé au moins deux choses qui te plaisent : la photographie et la boxe. De l’un t’en à fait ton métier, de l’autre la fringante jeunesse s’éloigne et si les pognes frappent moins forts elles continuent de frapper juste. Alors c’est la bandoulière qui ceint l’épaule du sac qui frotte au niveau de la hanche alors que tu retrouves ton local, à peine trépassé à l’odeur de sueur des efforts donnés, à l’éclairage qui déconne une fois sur deux. Sûr que t’aurais pu trouver mieux avec le fric que tu te fais, aller t’entraîner dans les beaux quartiers, mais ça serait oublier d’où tu viens et dans quelle merde t’as traîné avant d’y arriver.  

Et déjà quand tu débarques, tu salues les trombines que tu fréquentes et reconnais te file au vestiaire te changer. Pour foutre en boule tes fringues dans le casier, enfiler un short, marcel et chaussettes jusqu’aux mollets et pompes de boxe aux arpions alors que tu ramasses tes gants usés pour te diriger vers la pièce d’entraînement. C’est sans compter quand sortant de la consigne, on te bouscule, sans doute un mec qui regarde le sol au lieu de regarder devant là. « Tu peux pas regarder devant toi conn.. » que ça siffle déjà d’entre les lippes alors que la caboche se redresse, le nez se fronce et les sourcils se haussent sous un visage vaguement familier qui se remémore au crâne. « Slade? »            

ça fait quelques jours que t'es pas venu, peut-être même quelques semaines en réalité, que t'as pas boxé. tu t'rends comptes que t'arriveras sans doute jamais à t'en débarrasser réellement. t'as passé tout une partie de ta vie à ça et, clairement, t'as pas l'impression d'être doué pour faire autre chose de ta vie. et t'as toujours pas raccroché tes gants malgré tes soucis de santé, malgré le fait que ton niveau a clairement baissé. ça te fait chier ça. un soupir s'échappe de tes lippes.
c'est ton jour de repos, et t'as de comptes à rendre à personne, alors t'as tout simplement décidé d'y retourner. petite salle de boxe au fond des rues new-yorkaise, sans doute un peu mal famée sur les bords. mais t'es pas né à manhattan non plus. et y'aura sans doute de nouveaux visages, des anciens. mains enfoncées au fond des poches, t'avances dans les couloirs sombres, éclairés par des néons grisonnants. tu retiens un petit soupir.

t'avances, odeur de transpirations, bruits de combat un peu plus loin, c'est ton monde, ton univers. tu te pinces un bref instant les lèvres, soupir au bord de ces dernières, tandis que ton épaule vient à rencontrer celle d'un mec dont tu vois pas l'visage. tu lèves les yeux au ciel, pas décidé de t’arrêter avant d'entendre une voix. « tu peux pas regarder devant toi conn.. » tu fronces un peu les sourcils, te tournant d'un bloc. et puis finalement ton regard qui se pose sur un visage familier. tu l'observes longuement. « slade? » ace. tu souffles simplement face à ton vis-à-vis. tu sais pas pourquoi, pourquoi ce visage te revient si vite en tête.
ça en fait des années. tu souffles simplement, l'observant de haut en bas, égal à toi-même, n'en ajoutant pas beaucoup plus.

Tu te prends les pieds dans le colosse qui ne fait pas gaffe ou il colle ses pieds, ça te fait râler, claquer ta langue sur ton palet à défaut de lui en claquer une après tout c’est l’endroit pour. Mais il y a soudainement ton visage qui se déride en reconnaissant une gueule connue, de celles que t’aurais pu zappé avec les années et qui est pourtant restée. Slade Warner. Ça te fait sourire parce que t’es bien conscient que c’est sans doute la dernière personne sur qui tu pensais tomber en réalité. Et pourtant t’es pas réellement surpris dans le trouver dans ce genre de rade. Parce que tu l’as connu boxeur et apparemment les habitudes ont la vie dure quoiqu’on en dise.

Alors tu te redresses, sur tes deux guiboles et tu le toises un peu, il a vieilli, sans doute toi aussi, ce n’est pas la peine de te planquer dans ton déni. Il n’est pas très loquace Slade, il l’a jamais vraiment été mais ça te surprends pas réellement, c’est comme ça que tu l’as toujours apprécié. « Ça fait une plombe ouais.. » Presque une éternité pour dire alors tu viens aux nouvelles, te décalant du passage de l’entrée pour ne pas bloquer tout le monde. « Tu deviens quoi après tout ce temps? »                

tu ne pensais pas franchement revoir le brun dans ce genre d'endroit. tu l'observes un bref instant, tes prunelles glissant sur sa silhouette. sacré coup de vieux. de ton côté aussi, d'toute manière. ça fait combien d'années déjà ? t'en as absolument aucune idée, même ne réfléchissant à la question.
bien trop, quand on y pense.

« ça fait une plombe ouais.. » léger hochement de tête de ta part pour approuver ses mots. ouais, une sacré plombe, comme on dit. tu viens t'appuyer contre le mur et croises tes bras contre ton torse. « tu deviens quoi après tout ce temps ? » tu hausses vaguement les épaules face à la question. qu'est-ce que tu deviens ? tu te pinces un bref instant les lèvres. j'deviens trop vieux pour boxer. mon dos m'joue des tours trop souvent. tu marmonnes simplement. c'est pas faux en plus. tu comptes plus les jours ou tu regrettes d'y être allé comme y'a vingt ans. et j'bosse dans un club pour la sécurité. t'ajoutes. c'est pas mal pour résumé ta vie, après tout. t'éclipses toute la partie avec damen. c'est pas forcément le plus important dans ta vie. enfin, pas quand tu en parles avec un mec que t'as plus vu depuis des années. et toi, alors ? tu te contentes de demander. t'en diras pas forcément plus de ton côté, sauf p'être pour répondre aux questions. tu viens glisser tes doigts contre ta joue mal rasée, attendant la réponse du brun.