Dans l'univers. (Owen)

✩ Y'en a plein mais y'en a qu'une c'est toi.

Il y a comme une bulle qui s’est créée. Une qui les éloigne de la rancœur, des reproches, de toute la noirceur qui a pu entourer leur relation. Elle se rend compte, en l’écoutant lui dire qu’il tient à elle, qu’elle le croit. Elle croit en ses paroles, chose qu’elle ne faisait pas encore il n’y a pas si longtemps. Comme s’il regagnait tout doucement sa confiance, Owen. Comme s’il regagnait tout doucement son cœur. Elle a beaucoup de mal à rester indifférente à ses mots, à ses gestes, à ses caresses. Elle se sent troublée, légèrement électrisée par le moment qu’ils sont en train de vivre. Et quand elle plonge son regard dans celui de son premier amour, elle comprend sans mal qu’il éprouve la même chose. Il a cette lueur dans les yeux, celle qu’elle lui connaît si bien, celle qu’elle a vu tant de fois en lui avant qu’ils ne dérapent. Elle ne dit rien, lui non plus, mais elle sait qu’ils la ressentent tous les deux, cette électricité dans l’air. Elle essaie pourtant de rester concentrée sur la conversation qu’ils ont. Conversation à cœur ouvert. Jamais, elle n’aurait pensé qu’il puisse avoir ces craintes en lui. Jamais, elle n’a eu l’impression qu’il pouvait douter être à la hauteur. Il se trompe, il l’était. Il l’était jusqu’au moment où il a choisi de fuir. Elle baisse un peu les yeux, Cassey, comme pour se laisser le temps de digérer ces révélations. – Moi, je ne nous voyais pas du tout comme ça. Je t’assure que ce n’est pas ce qu’on était. Il était le premier homme qu’elle a aimé, le seul en vérité qu’il a aimé. Rien que pour cette raison, elle ne pouvait que le regarder avec des étoiles dans les yeux. Peut-être que tout aurait été différent s’il lui avait confié tous ses doutes, peut-être que leurs vies auraient été différentes. Mais, elle aussi, elle ne serait sans doute pas devenue la même personne. L’abandon si brutal d’Owen l’a obligée à devenir une femme forte, une femme qui sait rester debout, sans que l’on ne vienne lui tenir la main. Pourtant, ce soir, elle lui confie combien tout cela a pu être difficile pour elle. C’est la première fois qu’elle le fait. Avec lui, avec n’importe qui. Elle n’a pas l’habitude de se plaindre, Cassey. C’est même tout le contraire, elle ne montre jamais rien de négatif. Mais parler en toute transparence la libère, c’est douloureux, mais cela fait du bien à la fois. Les paroles de son ex petit-ami, elles aussi, lui font du bien. Peut-être que c’est précisément ce dont elle avait besoin d’entendre. Qu’à défaut d’avoir été la mère parfaite qu’elle aurait voulu être, elle a fait tout ce qu’elle pouvait pour Arya. – Merci… murmure-t-elle simplement, son regard toujours plongé dans le sien. Lorsqu’il fait remarquer qu’ils ne sont pas différents, la jeune femme lui adresse un petit sourire en coin. – Non, c’est vrai… Je suis juste plus mignonne que toi. Elle le taquine, c’est bon signe. Elle se sent un peu mieux. L’effet de l’alcool, l’effet d’Owen, elle ne sait plus trop. Elle repose son verre sur la table pour se repositionner confortablement sur le canapé. La tête posée sur le dossier, elle a les prunelles rivées sur lui. – Ta proposition que je dorme ici tient toujours ? Elle voudrait fermer les yeux, s’endormir, sans la peur qui lui taraude le ventre. Elle voudrait se sentir apaisée. Ne serait-ce que pour une nuit.

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Elle a l’impression que rien n’a changé. Que leur lien n’a pas changé. Peu importe la nature de leurs relations, il y a toujours cette osmose particulière entre eux. Ce sentiment, aussi, d’être avec quelqu’un qui la connaît par cœur, qui pourrait tout dire d’elle, tout savoir d’elle. Cela fait tellement longtemps que ce n’est pas arrivé. Les hommes se sont enchaînés dans sa vie sans jamais s’implanter pour de bon à l’intérieur. Jamais suffisamment pour la connaître par cœur, pour deviner ses réactions, pour lire dans ses gestes ce que ses mots ne disent pas. Cette complicité fusionnelle, celle que seul quelqu’un que l’on a aimé de tout son être peut connaître. Ça lui avait manqué. Il t’avait manqué. Cet aveu, elle a mis des semaines, des mois, des années en réalité, à se l’avouer. Mais elle s’en rend compte ce soir plus que jamais. Elle a besoin de sentir son contact, sa tendresse. Son regard en permanence sur elle. Elle a besoin de lui. Même après tout le mal qu’il lui a fait, même après toute la douleur qu’il lui a infligée, elle se sent incapable de rester sans lui. Et peut-être que c’est une erreur, encore une erreur de sa part. Peut-être qu’elle va le regretter. Mais, là tout de suite, elle ne peut pas regretter d’être venue le retrouver. Elle ne sait pas se passer de lui, pas quand elle sait qu’il est la seule personne à pouvoir lui effacer ses peurs. Il lui fait tellement de bien, plus qu’il ne peut l’imaginer. Un sourire revient enfin sur ses lèvres. Le sourire qui s’agrandit devant la remarque d’Owen. Et les yeux qui retrouvent les siens, plus timidement, alors qu’elle formule l’envie de rester chez lui ce soir. Il accepte tout de suite en affirmant qu’il va lui laisser son lit. La jeune femme entrouvre les lèvres, un peu surprise. Elle n’a pas pensé qu’il devrait préparer la chambre d’ami. Mais il est hors de question qu’elle lui prenne la sienne. – Je peux dormir sur le sofa, Owen. Ça m’ira très bien. Elle n’est pas aussi délicate qu’il le croit. Puis, de toute manière, elle manque de tellement de sommeil qu’elle pourrait sans doute s’endormir n’importe où. N’importe où tant qu’il est dans les parages. Mais elle n’a aucune envie de lui prendre son lit. Et l’idée lui vient, naturellement, de le partager avec lui. L’alcool dans son sang lui assurant que ce n’est presque rien. Ils ont dormi tant de fois ensemble, hein ? Elle se mordille une nouvelle fois la lèvre instinctivement avant de reprendre, la voix qui se veut assurée. – J’refuse de te faire partir de ta propre chambre.

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Elle ne serait jamais venue sonner à sa porte si tard un autre soir. Elle ne serait jamais venue quémander sa présence, son contact, un autre soir. Elle aurait encore moins accepté de dormir chez lui. Elle apprend tout doucement à pardonner à Owen, cela ne signifie pas qu’elle est prête à retrouver une telle intimité. Cela ne signifie pas qu’elle est prête à lui rendre toute l’importance qu’il a toujours eue. Mais elle se sent tellement épuisée, Cassey. Tellement fatiguée par tout ce qui lui arrive. Elle voudrait juste fermer les yeux une seule nuit pour récupérer, pour se sentir mieux. Et elle se sent rassurée avec lui plus qu’avec n’importe qui. Sans doute parce que c’est lui qui l’a sauvée de son agression, lui qui l’a sortie des griffes de cet homme. Et peut-être aussi parce qu’elle sait qu’Owen, il serait capable de n’importe quoi pour elle. Pour la protéger. Il retrouve de plus en plus sa confiance mais, sur ce point, elle n’a aucun doute. Cela date d’avant son agression. Elle l’a vu s’en prendre à un inconnu simplement parce qu’il avait posé sa main sur sa taille. Cela date même d’avant ce soir-là. Il a toujours eu ce besoin de la protéger, même quand elle n’avait pas besoin qu’il le fasse. Et, ce soir, elle en a besoin. Alors c’est sans mal qu’elle accepte de rester dormir dans cette maison où elle n’a pas sa place. Mais c’est plus difficilement qu’elle consent à prendre le lit du propriétaire des lieux. Elle insiste, lui aussi, et cela pourrait durer des heures avec leurs deux tempéraments têtus. Mais, finalement, il expose la seule solution qui n’en léserait aucun d’eux. Tu n’as qu’à dormir à mes côtés. Ses yeux qui restent accrochés aux siens, elle hésite. Elle hésite une fraction de seconde. Seulement quand elle imagine qu’il pourrait être à quelques centimètres d’elle pendant qu’elle dormirait, l’idée toute seule l’apaise un peu plus encore. D’un petit hochement de tête, elle accepte. – D’accord, je dors avec toi. Elle arrête d’emblée toutes les voix dans sa tête qui viennent lui murmurer que ce n’est pas une bonne idée. Elle a juste envie de se reposer le temps de quelques heures, juste envie de fermer les yeux sans redouter ce qui peut arriver. Elle glisse la main dans ses cheveux, d’un geste plus fébrile qu’elle ne le voudrait. – Tu peux me prêter un tee-shirt ? demande-t-elle avant de se redresser à peine, prête à le suivre jusqu’à sa chambre. Prête à retomber dans la gueule du loup.

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Dormir avec Owen. Vingt ans qu’elle ne l’a pas fait. Vingt ans qu’elle n’imaginait pas le faire à nouveau. Et peut-être qu’elle ne devrait pas, peut-être qu’elle devrait imposer une limite. Protéger le cœur qu’il a déjà trop bousillé. Mais elle n’a pas la force d’y arriver. Il y a l’alcool, il y a la fatigue, il y a la peur aussi. Puis, au fond, elle sait que cela ne s’arrête pas à ces circonstances. Elle sait que ce n’est pas anodin, ce n’est jamais anodin avec lui. Elle a seulement choisi de ne pas résister. Mais ils ne feront que dormir, bien sûr qu’ils ne feront que dormir. Pourtant, le regard plus intense d’Owen vient troubler ses pensées raisonnées. Elle ne sait pas à quoi, lui, il est en train de songer mais elle sent qu’il ne vaut mieux pas qu’elle le découvre. Essayant de garder une atmosphère légère malgré la tension, elle lui demande de lui prêter un tee-shirt avant de le suivre sagement jusqu’à sa chambre. Curieuse, elle laisse son regard prendre connaissance de la pièce. Elle s’arrête sur ce lit en se demandant, malgré elle, combien de femmes y ont dormi. Mais elle s’efforce d’oublier cette pensée pour relever la tête vers lui. Elle lui adresse un petit sourire lorsqu’il lui donne le tee-shirt dont elle se saisit distraitement. Trop obnubilée par lui, elle ne bouge pas. C’est lui qui interrompt le silence pour lui proposer d’aller prendre une douche. Il la met aussi à l’aise qu’il le peut, Owen. Cela la touche sincèrement. – Je veux bien… Merci Owen. Elle dépose un doux baiser contre sa joue avant de partir dans la direction indiquée. Une fois seule dans la salle de bains, elle pose le tee-shirt pour se déshabiller, la tête encore perdue dans ses pensées. Elle a du mal à croire qu’elle est vraiment chez lui pour y passer la nuit. Elle file tout de même sous la douche. Elle se sent un peu plus tendue qu’elle ne le devrait. Pourtant, elle n’est pas inquiète cette fois, juste… Nerveuse. Au bout de quelques instants, elle arrête enfin l’eau, tirant le rideau pour se lever quand elle se rend compte qu’elle n’a pas de serviette. Un petit soupir s’échappe de ses lèvres. Elle hésite à s’habiller tout de même mais elle ne peut pas attendre de sécher éternellement. Finalement, elle appelle le jeune homme à la rescousse. – Owen… Tu peux venir ? Elle tire le rideau à nouveau pour éviter qu’il ne la voit nue. Sa tête seulement sort du rideau de douche pour constater, une fois qu’il est là. – Je n’ai pas de serviette.

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Tout juste protégée derrière le rideau de douche, elle appelle Owen sans aucune arrière-pensée, sans aucune crainte. Pas vraiment pudique, elle ne se sent pas embarrassée de la situation. Elle attend juste nonchalamment qu’il vienne lui apporter la serviette qui lui manque. Elle a l’impression, malgré tout, de partager une intimité qui était encore perdue il y a seulement quelques jours. L’impression que tout est naturel, alors que cela ne devrait pas l’être. Quand, enfin, il approche de la salle de bains, il n’ose pas entrer jusqu’à ce qu’elle lui explique ce dont elle a besoin. Il ne prononce pas un mot, Owen. Ce qu’elle relève avec étonnement dans son esprit mais sans rien dire à voix haute pour autant. Elle attend qu’il pose la serviette, ou bien qu’il la tende vers elle, peut-être. Mais ce n’est pas ce qu’il fait. Non, à la place, elle sent subitement ses lèvres se plaquer contre les siennes. Un hoquet de surprise envahit la jolie blonde sans qu’elle ne réagisse, du moins pas tout de suite. Il tire le rideau tout en l’enroulant dans sa serviette. Et elle, elle ne le repousse toujours pas. L’étonnement laisse place à une vague de désir alors qu’elle finit par répondre à son baiser. Elle glisse sa main contre la nuque du jeune homme pour le prolonger avec intensité, sans guère résister. La tête toute retournée, elle le voit finalement reculer ses lèvres sans pour autant s’éloigner. Son front se pose contre le sien alors qu’elle peine à retrouver ses idées. – Je… Je crois. Elle ne sait plus trop ce qu’elle est censée dire. Ce qu’elle est censée ressentir. Elle sent juste cette douce chaleur en elle, cette électricité tout autour d’eux. Sa main libre se pose instinctivement sur sa serviette pour l’empêcher de glisser. – Owen, je… « Je ne peux pas faire ça. » C’est facile, dis-le, Cassey. Elle se sent défaillir. La sensation que cette serviette est de plus en plus minuscule alors qu’elle est incapable de dévier son regard des prunelles assombries de désir de l’homme en face d’elle. La sensation qu’il est partout autour d’elle, partout en elle. La sensation d’être toute petite face à lui. La sensation que, peu importe ce qu’elle veut, il aura toujours cette emprise sur elle. Et il la regarde de la même manière, Owen. Il la regarde comme s’il lui disait sans un mot qu’elle lui appartenait. – C’est… C’est pas une bonne idée. Première chose dont elle est sûre depuis qu’il est entré dans cette salle de bains. Aucun doute là-dessus, elle sait que ce n’est pas une bonne idée. Sa raison vient cruellement lui rappeler, quand son cœur en a atrocement besoin. Ressentir quelque chose d’agréable. Se perdre avec le seul homme dont elle n’a jamais été amoureuse, se perdre dans ses bras. Sa main qui reste plaquée contre la nuque d’Owen, elle ne le quitte pourtant pas des yeux.