Who we are comes to life. (amos)

☆ ☆ ☆
{ who we are comes to life }
crédit/ tumblr ☆ w/@amos lazaridis

Elle se redresse, gardant le drap sur elle, emmitouflée dans le lit de cette chambre d’hôtel. La nuit est tombée depuis bien longtemps et, ce soir, comme beaucoup d’autres, Sisi est de service. Elle ne passera pas la nuit ici, comme aucune autre. Elle ne dort pas avec ses clients, Sisi. Jamais. Elle reste professionnelle parce qu’elle ne parvient pas à voir ce qu’elle fait comme autre chose qu’un travail. La prostitution. Elle est tombée dedans sans même s’en rendre compte. Elle est tombée dedans parce qu’elle a cru, parce qu’elle a beaucoup trop cru. Parce qu’elle a pensé que la princesse qu’elle était pourrait s’en sortir dans ce monde de brutes. Parce qu’elle a compris, beaucoup trop tard, qu’elle avait toujours été protégée dans son monde doré. Parce qu’elle a réalisé, beaucoup trop tard, que la vie, la vraie, elle n’était peut-être pas capable de la vivre. Pas correctement. Pas comme une jeune femme de son âge le devrait. Elle en a trop voulu. Beaucoup trop. Beaucoup trop vite. Elle a agi, sur un coup de tête, elle a quitté Rome et ce qu’elle avait toujours connue pour venir faire la trainée à New-York. Il lui arrive parfois de penser à ses parents, à ce qu’ils penseraient d’elle en la voyant. Ils auraient honte, certainement. Ils seraient écœurés, certainement. Et elle, elle ne regrette pas pour autant. Elle ne regrette pas parce que cette vie n’a jamais été la sienne. Cette vie ne lui convenait pas, et elle ne lui conviendra jamais. Alors elle offre son corps, tous les soirs ou presque. Elle survit en vendant la seule chose qu’elle a, elle-même. Et le schéma est le même, systématiquement le même, chaque soir. Jusqu’à qu’une surprise arrive, jusqu’à ce qu’un client fasse la différence, comme ce soir, avec Amos. Amos, elle le voit pour la seconde fois seulement, et pourtant il a sorti le grand jeu. Hôtel luxueux, bouteilles de champagnes, jolies attentions. C’est rare, assez pour qu’elle le remarque, Sisi. Et alors qu’elle lui a donné la seule chose qu’elle possède, elle esquisse finalement un faible sourire en le regardant. - Un verre de champagne ? Après tout, pourquoi se priver ? Pourquoi refuser, pour une fois qu’elle tombe sur un homme charmant ? Sur un homme qui n’est pas là pour extérioriser n’importe quelle frustration sordide, ou pour avoir l’impression de contrôler quelque chose, quelqu’un. Pourquoi se priver, alors que c’est tout ce qu’elle a ?  

Le corps tendu sous chacune de tes caresses, une main qui la retiens, tes doigts qui enserre son poignet, la contrôlent, absorbe chacun de ses sursauts, chaque souffle qu’elle expire contre ta peau. Des baisers en cascade sur une peau trop douce, sur un parfum enivrant, oublient le temps d’un instant que la femme en dessous de ton corps n’est là que parce que tu la payes, pour l’enveloppe qui l’attend, les quelques billets pour une nuit partagée. Silvia, ta douce Silvia, la gamine qui dans une autre vie aurait pu te faire perdre la tête, te faire perdre la raison juste pour qu’elle t’appartienne un peu. Le souffle devient de plus en plus rapide, plus rauque, une chaleur qui envahit le corps et l’esprit, fait trembler tous les membres, l’apogée. Puis le calme qui revient subitement dans vos respirations essoufflées, le seul écho dans la pièce. tu restes pas la bien longtemps, tu restes pas allongé près d’elle, tu la prends pas dans tes bras, tu l’embrasses par rien de tout ça. Parce que c'est pas Lila, parce que c'est pas une fille qui compte, parce que c’est uniquement professionnel, parce qu’elle t’attend pas non plus sur ce terrain là. et c’est tant mieux.

Tu te lèves rapidement, te débarrasse du préservatif, enfile tes sous-vêtements, puis ton jean. La bouteille de champagne déjà en main, le bouchon que tu fais sauter avec une dextérité certaine, des gestes que tu pratiques souvent. Tu t’approches du lit, une flûte du liquide doré à la main, tu lui tends devant son air surpris. Un haussement d’épaules alors que tu coinces déjà un tube de tabac entre tes lèvres. “j’aime pas la bière chaude, et je ne bois du vin que pendant les repas”, t’essaie même pas de te justifier, t’aime ça, les hôtels de luxe, le champagne, la charmante compagnie dans ton lit. Ce n'est pas exceptionnel pour toi. Ce qui l’est par contre c’est ce que tu t’apprêtes à faire. un cliquetis de briquet, t’allume le tabac, t’assois au pied du lit, une main qui remonte sur sa cuisse dénudée. Une inspiration, tu plantes ton regard dans le sien. “Pour qui tu bosses Silvia ?”, tu craches la fumée de ta clope, te frotte le sourcil un instant, souffle. “je te déconseille de me mentir, j’ai peu de patience, et je connais déjà la réponse.”, Ta même pas attendu qu’elle se rhabille, même pas profité du moment, tu attaques direct, rentre dans le vif du sujet. elle est là, allongée à coté de toi pour une seule et unique raison. Parce qu’elle peut t’apporter les informations que tu recherches, le fonctionnement des McGrath depuis le retour de Lobo, les pièces manquantes au puzzle. Tu veux tout savoir, tout connaitre, avoir une longueur d’avance, tu’es devenu tellement parano depuis la mort de Rafail, que t’en perd la boule. Et si elle refuse de parler ? Si elle refuse de trahir ceux pour qui elle travaille ? T’as réfléchi à toutes les éventualités, mais ce serait tout de même dommage d’en arriver à la fatalité, de devoir l’éliminer, là dans les draps blancs.

☆ ☆ ☆
{ who we are comes to life }
crédit/ tumblr ☆ w/@amos lazaridis

Et elle se souvient encore. Elle se souvient encore de la première fois où elle s’est souillée, à Rome. De la première fois qu’elle s’est offerte à un homme sans importance, puis à un autre. A l’époque, elle ne s’était jamais sentie aussi vivante. A l’époque, elle avait l’impression qu’elle pourrait contrôler le monde. Et maintenant, elle est là. Elle s’offre tous les jours. Elle s’offre tous les soirs. Et ce n’est pas elle qui contrôle le monde, mais bien le monde qui la contrôle. Au fond, peut-être que c’était prévisible. Gamine qui n’a jamais rien vu. Gamine qui ne connait rien. Celle qui a toujours été protégée, celle qui a voulu se briser. C’est ce qu’elle fait, à chaque fois qu’un homme la touche. C’est ce qu’elle fait, chaque fois qu’elle se salie. C’est ce qu’elle fait, chaque fois qu’elle s’enfonce un peu plus dans la noirceur que devient sa vie. Elle aurait pu. Elle aurait certainement pu faire autrement. Si elle avait été courageuse, si elle avait été mieux préparée. Attrapant la flute de champagne qu’Amos lui tend, elle offre un sourire à son amant d’un soir. Elle en boit quelques gorgées, elle savoure, un vestige d’une ancienne vie. Un vestige de ce qu’elle a connu avant. La noblesse et son luxe, la douce vie d’une privilégiée, d’une héritière italienne. - Oh je vois. Son sourire reste sur son visage, il ne s’efface pas alors qu’elle observe le beau s’installer au sol. Elle le laisse caresser sa cuisse, posant à son tour sa main contre sa nuque. Elle remonte doucement, de bas en haut. Jusqu’à ce que sa question vienne retentir dans son esprit. Ce n’était visiblement pas une visite de courtoisie, ce soir. Car aucune de ses clients n’a jamais osé poser une telle question. Jamais. Pourtant, elle ne comprend pas tout de suite où il veut en venir. Elle ne comprend pas tout de suite ce qu’il cherche à savoir. - Pourquoi tu le demande, si tu le sais ? Les McGrath. En réalité, elle ne sait pas grand-chose sur eux. Elle ne les connait pas et n’a aucune envie de les connaître. Ils ne sont que ceux qui lui donne du travail. C’est tout. C’est tout. Sauf lui. Sauf Lobo. Lui, elle le connait. Elle le connait et elle y est bien trop attachée. Bien plus qu’elle ne le devrait. Elle ne l’a pas vu venir, elle n’a pas réalisé à quel moment il a pris cette place si importante dans sa vie, dans son cœur. Elle s’y est accrochée, sans savoir ce que cela signifie. - Qu’est-ce que tu veux, exactement ? Qu’est-ce que tu veux, Amos ? Parce que moi je ne peux rien te donner. Parce que moi je n’ai rien à donner. Rien de plus que ce que tu as déjà.