Ain't nobody hurt you like I hurt you But ain't nobody love you like I do † Ainswell

Quelque chose a changé, chez Katheryn. Quelque chose est différent depuis plusieurs jours, et elle ne saurait dire quoi, Kristina. Tout ce qu'elle voit c'est que la femme qu'elleaime est devenue plus distante. Plus froide. Katheryn qui, d'ordinaire, est toujours concentrée sur elle ne lui accorde désormais que très peu d'attention. Et l'étudiante ne comprend pas. Tout devrait commencera aller mieux, les pires épreuves sont désormais du passé et maintenant elles vivent ensemble pour de bon. Elle pensait que vivre ensemble serait une bénédiction pour elles, Kristina. Mais elle voit que c'est tout le contraire. Alors elle se pose des questions, un tas de questions. Et si Katheryn s'était déjà lassée ? Comme le lui avait dit Madison lors de sa mise en garde. C'est une idée qui lui traverse l'esprit mais elle ne peut pas le croire, elle ne peut pas l'accepter. Pas après tout ce qu'elles ont vécu. Parce qu'elle a confiance en Katheryn, Kristina. Elle a confiance en elle aujourd'hui plus qu'en quiconque. Et puis elle tente de relativiser, car Katheryn a changé depuis son malaise l'autre jour en centre ville. Peut-être qu'elle se sent fatiguée, peut-être que tous les bouleversements subvenus dans leurs vies lui ont fait prendre conscience qu'elle a besoin de temps pour elle. Peut-être que ce n'est que cela, et que rien de tout ceci n'est lié à leur histoire. Pourtant, aujourd'hui alors qu'elle quitte les cours, la jolie rousse a reçu un message de sa petite-amie lui expliquant qu'elle l'attendait à la maison pour avoir une discussion. Ce genre de message n'est jamais bon signe, mais Kristina est à mille lieux d'imaginer ce qui l'attend. Elle rentre alors aussi vite qu'elle le peut, et une fois la porte de l'appartement franchie, elle prend la parole. Mon cœur? J'ai fais au plus vite ! Affirme-t-elle en se rendant jusqu'au salon, face à Katheryn. Qu'est ce qui se passe ? Rien de grave ? Elle s'inquiète, évidemment qu'elle s'inquiète, après un message pareil. Tout ce qu'elle souhaite, c'est que Katheryn lui parle à cœur ouvert, qu'elle lui explique ce qui ne va pas en ce moment. Mais elle ne pourrait pas accepter de la perdre. Elle ne peut pas entendre que le problème c'est elles et leur amour. Parce qu'elles s'aiment, elles s'aiment plus que tout et cela Kristina ne peut pas en douter. Alors elle attend, patiemment, comme elle l'a toujours fait avec Katheryn. Parce qu'elle sait que la quadragénaire a souvent beaucoup de mal à s'ouvrir, à se livrer, et ce même auprès d'elle.

Au fond d’elle, elle sent bien que quelque chose ne va pas, Kristina. Elle est amoureuse de Katheryn, et de ce fait, elle la connait énormément. Par cœur, même. La quadragénaire ne peut plus lui cacher aussi facilement qu’avant que quelque chose cloche. Mais ce qu’elle ne comprend pas, en revanche, Kristina, c’est la raison de ce changement. Qu’est-ce qui peut bien venir tout bouleverser ? Tout bouleverser alors qu’elles ont tout quitté pour être l’une avec l’autre. Alors qu’elles sont enfin heureuses ensemble, sans aucune ombre au tableau. C’est cette question qui reste dans sa petite tête rousse. Et ce soir, elle va vraisemblablement avoir le cœur net. Mais elle ne s’attend pas, pas une seconde à ce que lui balance Katheryn en pleine figure. C’est terminé. C’est terminé entre elles parce que, selon elle, leur relation ne marchera pas. Kristina reste figée, quelques secondes, sans bouger, sans dire un mot. En réalité, elle ne parvient pas à encaisser ce qu’elle vient de lui dire. Elle n’y croit pas, tout simplement. C’est juste impossible, c’est improbable. Katheryn ne peut pas la quitter. Pas maintenant. Pas de cette façon. C’est impossible. Elles s’aiment, et Kristina a confiance en cet amour. Elle a confiance en sa petite-amie, plus que jamais. Après la fusillade, lorsqu’elle lui a laissé une seconde chance, Katheryn avait promis de ne plus jamais lui faire de mal. De toujours tout faire pour qu’elle soit heureuse, de toujours tout faire pour elle. Et jusqu’ici c’est ce qu’elle a fait. Elle a quitté sa femme, sa maison, son travail, et tout cela pour être avec elle. Alors elle ne peut tout bonnement pas la quitter maintenant, quelques semaines seulement après avoir démissionné. C’est juste complètement surréaliste. Pardon ? Elle la regarde dans les yeux, complètement abasourdie. Est-ce que c’est une blague ? Pourtant, lorsque Kristina pose son regard sur le visage de Katheryn, cette dernière ne semble pas plaisanter. Elle a l’air bien sérieuse. Mais comment peut-elle l’être ? Comment peut-elle être si froide en lui disant ces mots ? Des mots que la jolie rousse ne pensait jamais entendre. Jamais plus, de la bouche de Katheryn. Depuis quelques temps, elle a commencé à imaginer un avenir, un véritable avenir auprès d’elle. Elle s’est même confiée sur son viol, chose qu’elle n’a jamais fait auparavant. Alors non, elle refuse, elle refuse d’y croire.

Son cœur explose. Il explose complètement. Elle a la sensation que chaque mot que prononce Katheryn brise une petite partie de ce dernier. Cette douleur, elle est juste insurmontable. C’est quelque chose qu’elle n’a jamais ressenti auparavant, Kristina. Et ce malgré toutes les horreurs qu’elle a vécues. Un viol collectif, une fusillade, l’abandon de son père, le rejet de sa mère, tant de choses qui auraient pu la briser, définitivement. Mais non. Non. Malgré la douleur, malgré le désespoir, elle a toujours su remonter la pente. Elle a toujours su se relever. Mais perdre la femme qu’elle aime, perdre celle dont elle est littéralement tombée amoureuse, c’est juste inimaginable pour elle. Et surtout, elle est dans l’incompréhension, totalement. Katheryn avait l’air si heureuse de vivre avec elle. Elle avait l’air épanouie, beaucoup plus que lorsqu’elle l’a rencontré. Mais là, c’est tout le contraire qu’elle lui balance en pleine figure. Elle a même le culot de lui dire qu’elle savait déjà que leur histoire ne durerait pas, mais qu’habiter ensemble n’avait fait que le confirmer. Kristina n’en revient pas. Elle est blessée, plus qu’elle ne l’a jamais été. Ses yeux commencent à accueillir quelques larmes qu’elle tente pourtant de retenir par tous les moyens. Elle voit, elle voit que la quadragénaire est très sérieuse. Qu’elle semble décidée à la quitter. Elle lui avait pourtant promis de ne plus jamais lui faire de mal. Elle lui avait pourtant assuré qu’elle l’aimait, plus que n’importe quoi d’autre, qu’elle était amoureuse d’elle, elle aussi. Et la jolie rousse lui a offert sa confiance sur un plateau, sa confiance, mais aussi son cœur. Elle s’est offerte à quelqu’un, pour la première fois de sa vie. Elle a envisagé un avenir avec elle. Elle était prête à tout quitter pour elle. Et tout cela pour quoi ? Pour une histoire de quelques mois ? Pour une folie passagère ? Un amusement ? Non. Elle ne peut pas le croire. Pourtant, c’est ce que Katheryn laisse penser aujourd’hui. Tu te fous de moi Katheryn ?! Le ton monte. Mais au fond, c’est simplement son immense souffrance qui s’exprime. Tu m’as dit de venir vivre avec toi il y a un mois à peine ! Kristina ne peut imaginer que Katheryn puisse avoir si peu de considération envers elle. Elle a l’impression qu’elle la traite comme un objet, comme une vulgaire chose qu’on prend et qu’on jette. Comme… Comme au début de leur relation. Comme au début de leur histoire. Ce début que la blonde avait pourtant juré de ne jamais reproduire. Mais il faut croire que Madison avait raison, que Katheryn est comme cela et qu’elle ne changera jamais. C’est ce que lui dit son esprit, mais pas son cœur. Son cœur bat toujours pour elle, et elle n’a qu’à poser ses yeux sur son visage pour le sentir, Kristina. Alors elle s’approche d’elle, juste assez pour regarder sa petite-amie dans les yeux. Sa voix se brise alors qu’elle reprend la parole. Tu m’as dit « je t’aime », tu m’as dit « je t’aime » hier encore... Est-ce que tu réalises ce que tu es en train de faire ? Une larme coule sur sa joue alors qu’elle est complètement perdue. Elle ne peut pas concevoir ce qu’elle entend. Elle se demande même si Katheryn n’est pas en train de perdre la raison, si elle n’est pas folle. Elle imagine toutes les possibilités, toutes sauf celle que ce soit réellement terminé entre elles.

Elle tombe de mille étages. Elle tombe et se brise en une seule fois. Elle a l’impression qu’elle va complètement exploser. Elle a l’impression qu’elle va mourir, voilà la réalité. Elle ne supporte pas l’idée que sa relation avec Katheryn puisse se terminer. Elle lui brise le cœur. Elle lui brise le cœur tellement fort qu’elle a la sensation qu’il ne pourra plus jamais battre. Et l’incompréhension reste là. Elle reste présente. Katheryn est comme incapable de lui expliquer pourquoi elle la quitte, mise à part parce que cela ne marchera pas entre elles. Tout cela alors qu’elle lui avait affirmé croire en leur amour. En leur histoire. Bon sang, elle a quitté toute sa vie pour être avec elle, son étudiante, de vingt ans sa cadette. Elle a tout quitté pour finalement lui dire que ce n’est pas possible entre elles. C’est à se demander si elle ne cherche pas réellement à finir seule. Mais alors qu’elle pensait ne pas pouvoir souffrir davantage, Katheryn lui affirme que c’était une erreur. Une erreur. Une erreur de s’installer ave elle, une erreur de lui dire « je t’aime » ? Mais comment peut-elle être si cruelle. Elle se fiche totalement d’elle, de ce qu’elle ressent, c’est évident. Et à cet instant précis, Kristina ne contrôle plus rien. Elle ne peut plus retenir ses larmes qui coulent de plus en plus vite, de plus en plus fort. Elle ne peut pas non plus contrôler sa voix, ses éclats de voix. Une erreur ?! Elle reste sous le choc. Elle n’arrive pas à croire que Katheryn ose réellement lui dire cela en la regardant droit dans les yeux. Tu me dégoûtes Katheryn ! Je t’ai tout donné ! Tout ! Tout ce que j’avais et même ce que je n’avais pas ! Et toi tu me dis que c’était une erreur ! Elle lui crie dessus. Elle crie comme pour extérioriser sa colère, sa souffrance. Mais rien n’y fait et elle souffre bien pus encore. Elle est en miettes, Kristina. Elle fait les cent pas, elle passe une main sur son front, ne parvenant pas à se calmer. Et en plus tu ne ressens absolument rien ! Elle revoit la Katheryn qui lui a fait tant de mal des mois auparavant. Elle revoit la Katheryn froide, celle à qui elle a laissé une seconde chance. Celle qu’elle a pardonné parce qu’elle était bien trop amoureuse d’elle pour faire autrement. Elle revoit cette Katheryn tellement différente de celle qu’elle est à ses côtés. Ecoute-moi bien, si tu me fais ça, cette fois encore, c’est terminé. Tu es morte pour moi. Elle lui laisse une dernière chance de faire machine arrière. Une dernière chance de renoncer à cette folie. Mais elle ne pense pas une seule seconde ce qu’elle lui dit. Katheryn peut bien lui faire tout le mal du monde, jamais elle ne sera morte aux yeux de Kristina.

Le comportement de Katheryn lui glace le sang. Ses paroles l’électrisent presque immédiatement. Elle aimerait pouvoir disparaître, Kristina. Elle aimerait se réveiller et réaliser que ce n’était qu’un horrible cauchemar. Pourtant, tout ceci est bien réel. Tout ceci est vraiment en train de lui arriver, à elle. Elle est tombée amoureuse pour la première fois, et elle est tombée amoureuse d’une femme qui n’en a vraisemblablement rien à faire d’elle. Ni de personne d’autre que d’elle-même. Est-ce qu’elle s’est trompée à ce point ? Est-ce qu’elle s’est trompée à ce point sur Katheryn ? Comment a-t-elle pu ? Où est passée la femme douce et aimante, la femme bienveillante, forte et courageuse. Kristina a toujours vu en Katheryn tellement de choses, tellement de belles choses. Et c’est peut-être le problème, au fond. Peut-être qu’elle n’a toujours vu que ce qu’elle souhaitait voir en elle. Peut-être que toutes ces choses incroyables n’étaient que le fruit de son imagination. Peut-être qu’elle s’est complètement trompée, et que Katheryn est en réalité la femme que lui a décrit Madison. Pourtant une partie de Kristina ne veut pas se résoudre à le croire. Une partie d’elle ne peut pas se résoudre à le croire. Elle l’a aimé, elle l’a aimé dès la première fois que ses yeux se sont posés sur elle. Elle l’a aimé pour ce qu’elle était, entièrement. Et malgré tout ce qu’elle a pu lui faire, malgré toutes ses erreurs, Kristina s’est toujours battue pour elle. Elle a toujours cru en elle. Elle lui a tout donné. Et cela lui fait mal de l’avouer, mais peut-être qu’elle lui a trop donné. Elle ne contrôle plus rien, elle ne contrôle plus ses larmes, elle pleure, tout simplement. Elle pleure comme jamais elle n’a pleuré et ce sans même s’en rendre compte. Elle pleure tellement fort qu’elle a la sensation de se vider entièrement de toutes ses émotions. Mais Katheryn ne revient pas en arrière, elle maintient ses positions. Et la jolie rousse reprend alors la parole, blessée, écœurée. -  Tu sais quoi, Katheryn ? Je pense qu’en fait tu es incapable d’aimer qui que ce soit. Elle est tombée amoureuse d’un glaçon, d’un cœur de pierre, d’une femme incapable de donner à quiconque. Même pas à elle. Même pas à Kristina qu’elle prétendait aimer. Même pas à Kristina qui était pourtant capable de faire n’importe quoi pour elle. Elle se recule alors, et folle de rage, elle brise le premier vase qu’elle croise sur son passage, avec une grande violence. Une violence qui explose, une violence qui ne lui ressemble pas. Et puis elle rejoint la chambre pour attraper son sac de voyage et y mettre en vrac toutes les affaires qu’elle peut rentrer. Bien sûr, elle ne peut pas tout prendre, mais puisque c’est terminé, il est inenvisageable qu’elle passe la nuit ici. Chez elle. Une fois son sac rempli, elle se retrouve de nouveau dans le salon où Katheryn n’a pas bougé. - Je ne veux plus jamais te revoir. Sa voix est brisée, tout comme son cœur. Et cette fois, il est hors de question que Katheryn revienne vers elle. Jamais.