this painting is mine now | Harald

s’il y a bien une chose que tu détestes, c’est perdre.
depuis toujours, aussi loin que tu te souviennes, les échecs ont toujours déclencher en toi des réactions des plus violentes. des jeux de sociétés déchirés en milles morceaux, des jouets balancés contre les murs lorsque tu étais enfants. des vengeances illégitimes, des coups bas dignes des pires politiciens lorsque tu étais adolescent. maintenant adulte, c’est à l’intérieur que le feu brûle, tu as appris a le contenir avec le temps, à garder le sourire en toute circonstance. t’es même en mesure de féliciter la partie adverse. mais tu ne perds jamais. en règle générale. tout est fait pour que tu gagnes, le jeu est truqué d’avance.
putain de vente aux enchères.
tu rumines. depuis que ce tableau t’es passé sous le nez, en un rien de temps. vous n’étiez plus que deux. t’as été décontenancé par la ténacité de mademoiselle Walker. et le Pissarro tu l’as vu disparaître entre ses griffes.
putain de vente aux enchères.
c’est ce qui t’a poussé à te retrouver là, devant la porte de son appartement, après avoir demandé à oscar de t’y déposer entre deux de tes rendez-vous. au dernière étage de l’immeuble, une seule porte, tu n’en attendais pas moins. ton index s’écrase sur la sonnette, une fois. puis une deuxième, une troisième. impatient. peut-être qu’elle n’est pas là, auquel cas ta rage intérieure ne fera qu’être accentuée. toujours propre sur toi, toujours un costume trois pièce, tu frappes du pied, prêt à faire demi tour lorsque le bois craque et que la porte s’ouvre. le sourire que tu arbores est des plus crispés.
tu pensais pouvoir passer au dessus de tout ça. sincèrement, t’y croyais. mais tes démons t’ont rattrapé et te poussent à agir de manière stupide. tu entres sans y être invité.
j’étais dans le coin, je me suis dis que j’allais venir te saluer. tu mens sans même lui adresser un regard. t’avances dans l’appartement, observant avec minutie les lieux. un vrai atelier d’artiste. tout ce qui te plaît d’ordinaire, et plairait aussi à tes mères. tu te débarrasses de ta veste, que tu poses délicatement sur le dossier d’une chaise. tu l’as mis où ? que tu demandes alors que t’es déjà en train d’arpenter l’appartement comme si tu étais chez toi. tu ne tardes pas à le voir, accrocher seul, sur l’un des murs. non loin d’un mec à poil, que t’observes quelques secondes te demandant ce qu’il peut bien foutre là. tu comprend très vite quand tes yeux clairs se posent sur la toile et le fusain abandonné. l’homme te fusille du regard, t’en as pas grand chose à foutre, peut être qu’il parle mais tu n’entends rien. ton attention toute entière pour l’œuvre d’art qui manque tant à ton penthouse. tu restes planté devant, une main contre la repousse de ta barbe. tu soupires. tu voudrais l’arracher du mur, et la brûler, qu’aucun de vous deux ne puisse en profiter puisqu’elle te l’a volé. je t’offre le double, si tu la décroches tout de suite. que tu crashes finalement, tournant ton visage vers une robyn mécontente. elle et toi, c’est une guerre non violente, depuis l’enfance. c’est une succession de batailles que tu ne gagnes que trop rarement, depuis qu’elle est devenue une femme.