have a little faith (frida&castiel)

Ce n’est pas souvent que tu sors. Ce n’est pas que tu ne le souhaites pas ou que tu n’aimes pas te mêler aux autres - c’est juste que ce n’est pas une priorité, pas une chose à laquelle tu penses sans arrêt. La plupart de tes heures hors des cours se passent dans une salle informatique en compagnie d’un petit club informatique dont tu fais partie ou chez toi… derrière ton ordinateur. C’est pas tellement un choix en soit, plutôt une préférence, une évidence. Pourtant, quand on t’a proposé cette soirée entre étudiants, tu n’as pas hésité longtemps avant d’accepter. Tu te dis qu’à la fin de l’année scolaire, quand tu auras ton diplôme à la main, elle va te manquer cette ambiance. T’aimes bien te balader dans le campus. T’aimes bien l’ambiance de boulot, travailler en groupe. T’aimes bien la facilité que l’on a à se faire de nouvelles connaissances puis de nouveaux amis. Alors non, tu n’as pas hésité longtemps avant de rejoindre une poignée d’étudiant dans un petit bar du coin pour échanger autour d’un verre. T’as même passé une bonne soirée à enchaîner les verres d’un cocktail sans alcool que tu avais particulièrement apprécié. Faut dire, tu conduisais pour rentrer ce soir et tu étais chargé de ramener deux des mecs qui étaient déjà bien amochés quand tu es arrivé.

La fin de soirée arrive et ils tombent de fatigue. Tu comprends rapidement qu’il est temps de les ramener et de les laisser se reposer dans un vrai lit - plutôt que la tête dans leur bras sur une table. Ça n’a pas l’air de les déranger, eux, mais toi si. Tu dis donc au revoir et t’empresse de réveiller les deux oiseaux.

T’allais rentrer chez toi, enfin seul dans la voiture après avoir déposé tes camarades, lorsque tu remarques une silhouette sur le bord de la route. Une jeune femme qui, visiblement, boite. Tu fronces légèrement le nez. T’aimes pas cette image. Une fille seule à une heure pareille et qui boitille en plus… ça sonne une alarme dans ta tête. Tu ne vas la laisser comme ça. Tu ne peux pas la laisser faire ça. Alors tu viens doucement ralentir et ouvrir la fenêtre afin de lui parler. T’as conscience d’à quoi ça ressemble, t’es pas idiot. Alors t’essaies de lui faire comprendre que t’es pas un pervers, quand même. « Hey. Tu veux que je t’emmène ? » que tu demandes avec un petit sourire timide. « Promis j’suis pas un malade pervers. J’fermerai pas la portière à clé et tu pourras sauter si t’as peur. » T’essaies de faire de l’humour mais dans l’fond, tu te dis que tu t’y prends vachement mal et que tu auras vraiment de la chance si elle ne te dit pas d’aller te faire foutre.

Les nuits se font longues lorsqu'on a les bras vides. Assise sur son lit, face à la baie vitrée surplombant la ville, Frida avait pris le temps de méditer sur ses intentions futures. Les actes du lendemain. Ceux qu'elle regrettera le jour suivant. Elle ne savait pas où était Taz, et s'en moquait. Lila n'était pas disponible, et elle n'avait envie de croiser personne d'autre. Plutôt sombre ce soir. Sans l'ombre d'un sourire. Son visage se reflétait sur la vitre. Un reflet qui lui avait arraché une grimace, elle avait alors détourné la tête d'un mouvement de dégoût, avant de se lever. Les jambes presque branlantes à cause de la gravité terrestre, elle s'était enfuie dans son dressing afin de s'apprêter. Souffle court pour éteindre les bougies, c'est dans l'obscurité qu'elle se complaît. Elle était alors sortie, bravant l'emploi du temps de son entourage qui l'engageait à rester seule. Elle n'en voulait pas de cette solitude forcée. Lorsqu'elle s'abandonnait à cette dernière, c'était uniquement par envie. Rien de plus. Elle ne l'acceptait pas. C'était ainsi, que malgré ses prévisions, elle s'était retrouvée dans l'arrière cour d'un inconnu à faire du charme sans retenu. Sur ses talons hauts, après une soirée bien arrosée. Les mèches rebelles dégringolants de son visage, alors que le reste de sa chevelure tombait en cascade sur ses épaules dénudée. Ne frissonnant même pas face au vent. Elle était ainsi, Frida. Entière.
Le retour lui était pourtant plus compliqué. Sur le chemin, alcoolisée et prête à dégringoler les fosses à la moindre bourrasque de vent. Mais elle n'était pas tombée. Non. C'est son talon qui l'avait lâchée. À terre. Installée sur ses fesses, un rire amer lui échappa. De ceux effrayant les animaux féroces. Le talon dans une main, le reste de la chaussure dans l'autre, Frida avait une grimace coincée au bord des lèvres. La chute lui avait endommagé la cheville, l'empêchant de se rattraper à temps. Pas glorieux, mais personne ne l'avait vu. C'était donc fièrement, la tête haute et le regard d'une reine, qu'elle s'était remise debout. Comme si le temps pouvait reprendre son court, avec sa permission.

Une lumière vive s'approche en un halo flou. Par réflexe, Frida fronce les sourcils en plissant les yeux pour se protéger du faisceau lumineux. Pas inquiète pour un sou, pouvant se défendre aisément, elle s'approche alors de la voiture à la fenêtre ouverte. Simple hochement de tête afin de dire bonjour. « Hey. Tu veux que je t’emmène ? » La belle penche la tête sur le côté, comme pour évaluer la situation qui se présente devant elle. La marche va être longue, et son talon cassé ne l'aide pas à avancer. Afin d'être plus stable, elle avait été obligée de retirer sa deuxième chaussure et avançait donc pieds nus sur l'herbe sèche. C'était douloureux, mais frida ne se plaignait pas. Jamais. C'était un signe de faiblesse, d'après elle. L'homme a un sourire timide qui lui rehausse les pommettes, un joli sourire. « Promis j’suis pas un malade pervers. J’fermerai pas la portière à clé et tu pourras sauter si t’as peur. » Elle balance la tête de gauche à droite, amusée par sa réflexion. Elle savait bien de quoi ça avait l'air, mais n'était pas le genre à se méfier des apparences. Elle n'avait pas peur de cet homme. S'il tentait quoi que ce soit, elle pouvait nettement gérer la situation. Être une demoiselle en détresse ne lui convenait pas.
— Si je monte, c'est toi qui sautera à cause de la peur.
Elle essaie de sourire, de ne pas être trop froide, trop Frida. Mais son sourire sonne faux, elle fait plus peur qu'autre chose avec ses lèvres charnues qui ambrassent le rythme de son coeur. Elle plisse les lèvres et secoue la tête.
— Premièrement, j'avoue que tu es très mignon, mais je ne coucherai pas avec toi en échange.
Elle s'accoude à la portière afin de se rapprocher de la fenêtre et ajoute.
— Et deuxièmement, je ne veux pas t'être redevable. Alors je vais passer mon tour.
Elle se redresse et recule. Léger signe de main afin de lui dire au revoir et elle commence à s'éloigner, la jambe toujours endommagée. Les chaussures à la main. Et l'alcool stagnant dans son cerveau robotique. Elle crie afin qu'il l'entende malgré le vent.
— Toi et ta pseudo bonté, vous pouvez aller voir ailleurs si y'a pas une demoiselle en détresse à sauver.

Elle ne semble pas avoir peur, au contraire. Ça te fait sourire de voir qu’elle ose, qu’elle s’approche, qu’elle va même jusqu’à te répondre. « Si je monte, c'est toi qui sautera à cause de la peur. » Ca te fait sourire cette remarque. T’aimes bien son répondant, t’aimes bien le fait que tu ne passes pas pour un prédateur, aussi. Mais si tu t’attendais à te faire rejeter, à te prendre un refus en pleine figure - ce n’était certainement pas pour la raison qu’elle te donne ensuite. « Premièrement, j'avoue que tu es très mignon, mais je ne coucherai pas avec toi en échange. » qu’elle commence en s’accoudant à la portière. Elle te souffle. Elle te coupe la chique. Tu restes là à la regarder, un sourcil arqué. Tu pensais pas qu’elle ira s’imaginer que tu voulais un truc en échange, que tu cherchais à la rendre redevable. « Et deuxièmement, je ne veux pas t'être redevable. Alors je vais passer mon tour. » Elle recule. Elle te laisse là, avec la bouche légère ouverte et le sourcil arqué - comme un putain d’idiot. Ce n’est qu’après quelques longues secondes que tu sembles retrouver tes esprits, que tu observes la situation et que tu te remets de tes émotions. « J’voulais juste t’aider... » que tu souffles. « J’voulais rien en retour. Et encore moins… hum. » Tu passes ta main sur ta nuque, gêné, quand tu commences à faire allusion à cette histoire de sexe. Ça te gêne un peu, qu’elle te lance ça comme ça, aussi naturellement. C’est pas un truc que tu fais avec n’importe qui toi, ça. C’est un truc que tu fais avec la personne avec qui tu es, rien de plus.

T’es pas du genre à insister. Tu as envie de l’aider, tu as envie qu’elle comprenne que tu ne vas rien lui demander en retour, que les gens sont parfois juste gentils sans rien chercher - que ça existe. Pourtant tu veux respecter sa décision. Non, c’est non après tout. Et même si t’es un peu vexé, même si t’es un peu blessé, tu ne vas pas chercher à la faire changer d’avis à coup d’arguments bien placés. Si elle ne veut pas, tant pis. « Toi et ta pseudo bonté, vous pouvez aller voir ailleurs si y'a pas une demoiselle en détresse à sauver. » Bon. Tu es peut-être quelqu’un de serviable et de bien éduqué - merci maman - tu n’apprécies pas spécialement de te faire marcher sur les pieds, surtout lorsque l’on te juge sans te connaître. « Juger sans connaître, hein ? » que tu souffles dans sa direction avec un petit sourire triste. Tant pis. Tu laisses la remarque suspendue dans l’air et tu hausses les épaules, tout seul dans ta voiture. Tu t’apprêtes à repartir, à oublier, à la laisser rentrer toute seule en boitant - tant pis pour elle, après tout. Mais tu ne peux pas. Tu n’y arrives pas. Dans ta tête, ya cette petite voix qui te dit que si quelque chose lui arrive ensuite, ce sera ta faute. « Tu veux pas laisser ta fierté de côté pour une petite fois ? Une toute petite ? » Tu fais même le geste avec tes doigts, mimant un espace très petit entre ton pouce et ton index. « Et je demanderais rien en retour, vraiment. Promis. Juré même. » Tu marques une légère pause avant de poursuivre. « Mais pas craché. Ouais non. Pas dans ma voiture. » Une tentative d’humour. Bravo mon gars.