Arms. (Tossey)

Toby se sentait bien dans ce lit, entre ces draps, l'esprit perdus dans des rêves plus tendres les uns des autres. Contre lui, quelque chose de chaud commençait à bouger, alors qu'il tentait de le garder dans ses bras à tout prix. Le corps chaud de Cassey, qu'il serrait contre son torse, avec vigueur, comme si elle était une peluche vivante. La nuit avait été passionnée, torride, sensuelle... Toby n'avait jamais imaginé quelque chose de tel, et il s'en était jamais senti capable non plus. Toby n'avait jamais aussi bien dormi non plus. Depuis plusieurs jours, ses nuits étaient hantées par des pensées plus complexes les unes des autres, par des labyrinthes de questions, par des craintes. Il ouvrit finalement les yeux, à contre-coeur, ne sentant plus la belle contre lui. Son regard se plongea sur elle, s'accrochant à ces deux magnifiques perles bleues qu'elle portait en guise de yeux. Elle était réelle, bien là, dans ce lit, avec lui, et sa voix le sortait de sa torpeur. Cela n'avait vraiment pas été un rêve. Ils avaient fait l'amour. Il l'avait embrassée et lui avait fait l'amour. C'était réel. "Salut toi..." répondit-il en affichant un sourire, les joues roses. Il ne savait pas s'il devait se cacher, ou s'il devait faire comme si de rien était. Il n'avait pas honte, c'était juste qu'il ne savait pas comment se comporter dans ce cas-là. A vrai dire... Il ne se rendait compte qu'à présent de la portée de son acte. Il avait brisé ses promesses. Pour la première fois de sa vie, il n'avait pas suivi les voeux qu'il avait donné à son ordination. Et soudain, c'était tangible : le jeune homme ne pouvait plus revenir en arrière. Et le pire: il ne le regrettait pas. Comment ne pouvait-il pas le regretter? Comment ne pouvait-il pas se sentir sali, comme un traître qui venait de briser toutes ses promesses? Comment ne pouvait-il pas ressentir la douleur de la contradiction de ses actes? Parce que c'était elle... Cassey. Parce que son esprit faisait tilt subitement. Il ne l'avait pas rencontrée par hasard. Il ne lui avait pas fait l'amour par hasard.
"Très bien, et toi?" demanda-t-il finalement, d'une voix plutôt joyeuse, alors qu'il posait un regard tendre sur elle. Il ne voulait pas la mettre mal à l'aise... Mais Cassey, elle avait l'air heureuse, comme ça... Pourquoi briser ce moment par des doutes? Et surtout, il avait envie de rester avec elle. Encore longtemps. Toujours peut-être. Cette nuit, il ne la regrettait pas, pour le moment du moins, et surtout... Il se demandait ce que cela faisait d'eux. Ce qu'ils étaient l'un pour l'autre à présent. Car il le savait: jamais il ne pourrait se donner à une personne pour laquelle il n'éprouvait pas le plus noble des sentiments. Mais Cassey, pour elle, il n'en était qu'un de plus dans son lit. Cette unique pensée ne fit qu'assombrir ses yeux clairs. "Je..." A vrai dire, il ne sut quoi dire, alors il opta pour le silence, se pencha vers la demoiselle et déposa un baiser contre ses lèvres, avant de s'écarter et de lui offrir l'un de ses plus beaux sourires solaires.

Cette nuit, Toby ne l'oublierait jamais. C'était la première fois qu'il donnait son corps à une femme, et pas n'importe laquelle. A présent, il comprenait ce qu'il ressentait pour elle, ce qui l'avait poussé à la recontacter, à l'attendre devant la porte de son hôtel pour la croiser par hasard, lors de leur deuxième rencontre. C'était un flash. Obligatoirement. Il poussa un soupire, pour se calmer. Cassey était de très bonne humeur, visiblement, et Toby n'avait aucune envie de briser le petit nuage sur lequel il se trouvait, malgré les questions qui pointaient de nouveau le bout de leur nez dans un esprit embrumé par des promesses rompues. Un baiser fut échangé, suave, délicat. Une façon de se dire qu'ils avaient tous les deux apprécié le moment et qu'il n'y avait rien à regretter de leur acte. Acte d'amour, pour Toby du moins. "Tu es belle..." souffla-t-il simplement à l'intention de la demoiselle. Naturelle, dans sa tenue d'Eve, sans le maquillage de la journée ni autre fioriture, Cassey lui semblait encore plus belle, rayonnante. Il était envoûté. D'ailleurs, elle se leva finalement, sans pudeur, pour aller enfiler un peignoir. "T'aurais pu me laisser profiter de la vue encore un peu..." déclara Toby, alors que ses joues devinrent rouges de nouveau. Jamais il n'aurait cru qu'il puisse dire une telle phrase à une femme. Avec Cassey, il avait l'impression de ne plus avoir de filtre. Après tout, il lui avait donné son corps... Et pour lui, ce n'était pas banal, ce n'était pas rien. D'habitude, il fallait être marié avant cette étape. Mais il était hors de questions d'en discuter. Pas maintenant. La voix de la demoiselle le rappela à la réalité, alors qu'elle lui proposait un café. "Oui, je veux bien un thé, s'il te plaît." finit-il par répondre, avant de quitter lui-même la couverture et le lit douillet. Nu comme un ver, il se baissa pour ramasser ses affaires, enfila uniquement son boxer cependant. Il faisait chaud dans cette pièce. "Tu... Tu n'as pas faim?" demanda-t-il, s'approchant de la demoiselle, passant les bras autour de ses hanches par derrière, la serrant contre lui, venant déposer un petit baiser dans son cou. Ce corps lui manquait déjà. Pouvait-on devenir addict en une seule prise? "Si tu veux, on peut aller prendre un petit-déjeuner ensemble quelque part, qu'en dis-tu? C'est moi qui régale." proposa-t-il naturellement.

Elle sembla surprise de son compliment, pourtant naturel et sincère. "Oui." répondit-il simplement, sur un ton doux. "Tu es parfaite comme tu es." déclara-t-il, ensuite, toujours avec ce sourire solaire qui le caractérisait tant. Elle se leva la première, indiquant devoir prendre son café matinal. Et Toby eut tôt fait de la suivre à son tour, déjà trop accro pour rester trop loin d'elle. Pas tout de suite, pas à présent. C'était si frais. La panique aurait pu prendre part de son être, lorsqu'il avait réalisé la portée de son acte, mais au lieu de cela, il restait calme et tentait de profiter du moment présent en compagnie de Cassey. Il assumait son acte. Certes, cela n'avait peut-être pas été judicieux, peut-être qu'il s'en voudrait plus tard, mais toutes ces pensées, il les mettait pour le moment de côté, dans un coin bien fermé de son esprit, dont il aimerait perdre la clef. Il s'approcha, passa ses mains autour de la taille de la demoiselle, en lui faisant une proposition alléchante. Visiblement que pour lui. Elle n'avait pas l'air froide, Cassey, mais... distante. Oui, distante. Comme effrayé. Mais de quoi? De lui? De son geste tendre. Toby baissa un instant les yeux.
"Oh non, je n'ai pas bien faim moi non plus..." déclara-t-il, alors qu'elle lui proposait d'aller prendre un petit-déjeuner seul, dans son coin. Et évidemment, il avait faim. Mais il était hors de question qu'il la quitte à présent! "Et je n'ai rien à faire, alors... Peut-être que je pourrais t'aider... Si jamais c'est des démarches administratives, ou.....enfin, je peux servir." déclara-t-il, haussant les sourcils en la regardant. Cassey, jusque-là très joueuse, avait l'air de s'être calmé. Et il se damnerait pour savoir ce qui était en train de passer à travers l'esprit de la jeune femme. "Je..." Il avait peur subitement, peur qu'elle le rejette. Mais lui, il voulait passer la journée à ses côtés. Quoi qu'elle fasse. Du moins la matinée. "Est-ce que je peux utiliser la douche?" demanda-t-il finalement, presque timidement, changeant de sujet, pour faire perdurer l'instant.

Toby, il avait besoin d'elle en ce moment, plus que de quiconque. Il attrapa la tasse tendue, sur un refus un peu brutal. Dommage. Mais il ne s'avouait pas vaincu. Il lui avait tout donné, et il n'était pas le genre de garçon qui allait se rhabiller et partir en silence. Ce don de lui, c'était si symbolique pour lui, c'était comme un aveu envers lui-même. Il était entré en contradiction avec son essence-même, il avait brûlé ses ailes et il en redemandait encore. Il avait des sentiments envers elle, des envies aussi. Il voulait la connaître davantage, encore et toujours. Celle qui était devenue son amie, puis, à présent, son amante. La toute première. La seule. Ce ne pouvait être que la seule. Et il avait brisé tout ce qu'il avait promis de respecter, ce qu'il avait respecté pendant plus de dix années. Sa raison de vivre. Mais il ne ressentait nullement cela comme un sacrifice, pas pour l'instant. Tout ce qu'il voulait, c'était passer son temps avec elle. Elle, pour qui son regard se mettait à briller, pour qui son sourire naissait sans arrêt.
Et lorsqu'elle refusa une nouvelle fois qu'il l'accompagne, affirmant qu'elle allait voir son frère dans peu de temps, Toby ne put cacher ses réels sentiments plus longtemps. Il ne savait pas faire ça, Toby, on lisait en lui comme dans un livre ouvert. Ses yeux se parèrent d'une certaine tristesse, et les traits de son visage, d'une certaine déconfiture. "Oh." L'onomatopée fut la seule chose qui sortit de ses lèvres, et rapidement, il se tourna pour aller prendre la fameuse douche demandée, avant que son interlocutrice ne se rende compte de la perte de son sourire. Mais c'était impossible de ne pas le voir.
Il profita de ce moment seul pour se retrouver à contempler son âme. Qu'est-ce qui n'allait pas avec lui? D'abord, Isa. Maintenant, Cassey. Était-il sain d'esprit? Il avait beau tourner et retourner les événements de la veille dans sa tête, rien y faisait: il n'éprouvait aucun regret. Ce n'était pas normal. Son coeur se mit à battre à tout rompre, ses mains devinrent moites alors qu'il serrait le pommeau de douche entre ses doigts. Et en pensant à Cassey, son âme s'embrasait. Elle n'avait pas l'air d'être dans le même état d'esprit, quant à elle. Finalement, il sortit de la douche, s'essuya avec l'une des nombreuses serviettes propres présentes dans l'armoire, et retourna dans la chambre. Il envoya un petit sourire à la jeune femme. Puis, il décida de prendre son courage à deux, alors qu'il enfilait de nouveau ses vêtements. "T'es sûre que t'as pas besoin d'aide?" Il n'abandonnait pas. Elle le rejetait, et il ne parvenait pas à l'accepter. Ce don, qu'il lui avait fait, c'était l'une des choses les plus importantes de sa vie.

Si elle avait besoin de ses bras. Pas de lui. Juste de ses bras. Et sans doute d'une autre partie de son anatomie. Mais si elle ne voulait que de son corps, il était prêt à le lui donner. Autant de fois qu'elle le voudrait et avec autant de passion que la nuit précédente. Toby était prêt à lui offrir ce qu'elle demandait, si c'était tout ce qu'il pouvait avoir. Des nuits torrides entre ses bras. Il était en train d'enfiler ses chaussettes lorsque Cassey lui demanda s'il allait bien. La question le prit au dépourvu. Alors, s'intéressait-elle bien plus à son âme qu'elle ne le laissait paraître ?"Ça va..." déclara-t-il dans un sourire. Mais même si l'extase du moment le cachait un peu, l'empreinte de leurs ébats et la découverte que venait de faire Toby, même si les questionnements s'étaient calmés, Toby était encore plus perdu que la veille. Il avait l'impression de ne plus avoir d'identité. Il avait la sensation d'être un étranger pour lui-même.

"Cassey..... il faut que je te dise quelque chose de très important..." Aller.. dis-lui. Dis-lui comment tu penses à elle. Dis-lui le fond de ta pensée. Dis-lui tout ce que tu aimerais lui dire et bien plus encore. Parle-lui de son importance à tes yeux. Dis-lui qu'elle ne peut pas faire tout cela et ne te considérer que comme un homme de plus dans son lit. Ses lèvres s'ouvrirent puis se fermèrent instinctivement, dans l'hésitation. Un silence de quelques secondes prit place. "Ce serait pas une tache de café, là, sur ton peignoir?" Finit-il par formuler, se levant pour la rejoindre. Il attrapa son thé, qui avait refroidi, et l'avala doucement, gorgée par gorgée. Il ne voulait pas partir. Vraiment pas. Il savait qu'il ne trouverait aucun prétexte pour rester avec elle. Cassey le fuyait. C'était évident. Le jeune homme voulait lui proposer de se rejoindre dans l'après-midi, mais il n'osait plus...