race against time (sean)

REESE &
SEAN

Aujourd’hui, après sa petite bataille nocturne et sans doute une petite sieste dans sa caisse, elle s’était dit qu’il était temps pour elle de se laisser bercer par la nostalgie des fous fuyants sa colère. Elle avait marché tranquillement dans la rue, le regard bien droit, pas même un tremblement.

Sûre d’elle.
Gamine,
devenue féline.

Reese dans un parc, elle se dit que c’est pas vraiment le lieu pour un chat, entouré de chien, entouré de cons. De personnes trop heureuses qui vivent dans de belles villas et qui viennent avec des enfants en laisse. Les futurs toutous de la société, qu’elle se dit. Elle les déteste parce que c’est les futurs harceleurs des gamines comme elle.

Et celui qu’elle voulait revoir.
Était bien le pire des chiens.

Assise sur ce banc, les mains cachés dans les poches de sa veste, elle attends. Elle attends le levé du jour, le son des oiseaux, et le bruit de sa course.

Sa respiration.
Haletante.
Sa respiration.
Contrôlée.

Elle l’attendait lui, en sachant déjà qu’il y passerait. Reese, vagabonde, Reese qui sait tout. Elle le connaît sans le connaître. Sa routine, elle l’a enregistré pour mieux le détruire. Comme celle de Sage. Comme celle de Seth. Comme celle des autres. Elle les connaissait par cœur, récitait dans sa voiture chaque jour comme un poème les actions qui guident leurs pas pour mieux les reconnaître, pour mieux les piéger, pour mieux les torturer quand le jour viendra.

Et le levé de soleil.
Qu’elle attend.
Le levé de soleil qui doit la faire brûler.
Phoenix.
Elle veut s’enflammer dans un nouveau jour.

Elle va engloutir le monde de ses flammes.
Et voler, voler, de ses propres ailes.
autrefois blanche.
autrefois belle.

Aujourd’hui
son cœur
est
chardon
et ses ailes
sont
noires.

Et quand le soleil brûle
la peau
est-ce qu’elle s’était réellement mit à sourire
ou n’était-ce que l’illusion
que Sean se faisait de son souvenir ?

Elle s’est levé en attendant sa silhouette se former dans le paysage. Et quand elle l'a vu, elle a ressenti de nouveau cette vive colère, et pourtant, ce doux sentiments de ses aveux. Elle allait le torturer. Le tourmenter.

Briser ses ailes.
Oh, Sean, tu ne voleras plus sur
la piste
de course.

Et il passe à quelques centimètres d’elle, une brise caresse son visage, ses cheveux s’envolent doucement, et elle court elle aussi, à ses côtés, sans grande difficulté. Elle le regarde et alors qu’il pose les yeux sur elle, elle prendrait presque un air de défi.

« Ça faisait longtemps, Sean. »

L’illusion d’un sourire.
Et le cœur léger,
presque
comme avant le lycée.
presque comme
avant les enfers.

Elle court.

« J’espère que je t’ai manqué. Car si tu ne cours pas plus vite, tu risques de me perdre de vue chéri. »

Elle court.
Plus vite.
La tête droite.

La distance se creuse.
Et elle hurle.

« Si tu gagnes, peut-être que je serais plus indulgente avec ton petit cœur fragile, Sean ! »

Et si il ne l’entend pas rire, c’est parce qu’elle s’est retenue.
Et si il ne l’entend pas respirer.
c’est parce que depuis le lycée
elle
ne
respire
plus.